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05 février 2006

Tout à tous




« JE ME SUIS FAIT TOUT À TOUS »








1 Corinthiens 9, 16-23

16 Annoncer l’Évangile n’est pas pour moi un sujet de gloire, car la nécessité m’en est imposée; malheur à moi si je n’annonce l’Évangile!
17 Si je le fais de bon gré, j’en ai la récompense; mais si je le fais malgré moi, c’est une charge qui m’est confiée.
18 Quelle est donc ma récompense ? C’est, en évangélisant, d’annoncer gratuitement l’Évangile, sans user du droit que l’Évangile me donne.
19 Car, bien que je sois libre à l’égard de tous, je me suis rendu le serviteur de tous, afin de gagner le plus grand nombre.
20 Avec les Juifs, j’ai été comme Juif, afin de gagner les Juifs; avec ceux qui sont sous la loi, comme sous la loi — et pourtant je ne suis pas moi-même sous la loi — afin de gagner ceux qui sont sous la loi;
21 avec ceux qui sont sans loi, comme sans loi — et pourtant je ne suis pas moi-même sans la loi de Dieu, mais sous la loi de Christ — afin de gagner ceux qui sont sans loi.
22 J’ai été faible avec les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin d’en sauver de toute manière quelques-uns.
23 Je fais tout à cause de l’Évangile, afin d’y avoir part.

Marc 1, 29-39
29 Juste en sortant de la synagogue, ils allèrent, avec Jacques et Jean, dans la maison de Simon et d’André.
30 Or la belle-mère de Simon était couchée, elle avait de la fièvre; aussitôt on parle d’elle à Jésus.
31 Il s’approcha et la fit lever en lui prenant la main: la fièvre la quitta et elle se mit à les servir.
32 Le soir venu, après le coucher du soleil, on se mit à lui amener tous les malades et les démoniaques.
33 La ville entière était rassemblée à la porte.
34 Il guérit de nombreux malades souffrant de maux de toutes sortes et il chassa de nombreux démons; et il ne laissait pas parler les démons, parce que ceux-ci le connaissaient.
35 Au matin, à la nuit noire, Jésus se leva, sortit et s’en alla dans un lieu désert; là, il priait.
36 Simon se mit à sa recherche, ainsi que ses compagnons,
37 et ils le trouvèrent. Ils lui disent: "Tout le monde te cherche."
38 Et il leur dit: "Allons ailleurs, dans les bourgs voisins, pour que j’y proclame aussi l’Evangile: car c’est pour cela que je suis sorti."
39 Et il alla par toute la Galilée; il y prêchait dans les synagogues et chassait les démons.


*


La guérison par Jésus de la belle-mère de Pierre, nous dit l’évangile selon Marc, fait que sa réputation se répand, et il est amené à guérir beaucoup de monde alentour…

Trouve-t-on une explication de cela dans le récit biblique connu sous le nom de "jugement de Salomon" (1er livre des Rois, ch. 3, v. 16-28) ? Souvenez-vous : deux femmes habitant la même maison ont chacune un enfant. Un des enfants meurt. Les femmes, affirmant chacune que c’est le sien qui est resté en vie, demandent le jugement de Salomon, qui tranche — si l’on peut dire — en ces termes : « "Coupez en deux l'enfant vivant, et donnez-en une moitié à l'une et une moitié à l'autre." La femme dont le fils était le vivant dit au roi, car ses entrailles étaient émues au sujet de son fils: "Pardon, mon seigneur! Donnez-lui le bébé vivant, mais ne le tuez pas!" Tandis que l'autre disait: "Il ne sera ni à moi ni à toi! Coupez!" Alors le roi prit la parole et dit: "Donnez à la première le bébé vivant, ne le tuez pas; c'est elle qui est la mère." »

Une sagesse qui a fait école : quelques millénaires plus tard, « au XIXe siècle, dans un petit village de Russie, deux familles cherchaient à marier leurs filles. Elles ont réussi à faire venir deux jeunes gens de très loin. Pendant leur voyage, le train est attaqué par des cosaques, et l'un des deux jeunes gens est tué. Finalement le rescapé arrive. Les deux mères s'écrient chacune que c'est bien le jeune homme destiné à sa fille. On décide de s'en remettre au jugement du rabbin.
- Coupez-le en deux, conclut-il, et chaque jeune fille aura ainsi la moitié de son corps.
- Oh non ! s'écrie l'une des deux mères. Ne le tuez pas, ma fille en trouvera un autre !
- Si ! Si ! Coupez-le ! exige la seconde.
Le rabbin montre alors la seconde et conclut :
- C'est elle la belle-mère ! »
(M.-A. Ouaknin, D. Rotnemer, La bible de l'humour juif, Paris, Ramsay - J'ai lu, 1995, p.197).

La façon dont se répand la réputation de Jésus et du cercle des disciples serait-elle de cet ordre ? — Quel amour remarquable parmi eux, si on y guérit même les belles-mères !… Voilà décidément une communauté chrétienne où comme le dira Paul, on se fait « tous à tous ».

Au-delà de la blague… Paul aux Corinthiens : « Je me suis fait tout à tous ». C’est de là que je vous propose de partir pour une réflexion en forme de bilan : nous voilà au lendemain d’un mois de prière pour l’unité des chrétiens — de la semaine universelle de prière de l’Alliance évangélique à la semaine de prière pour l’unité des chrétiens.

Une sorte de mise en perspective n’est pas inutile — à la fois bilan, réflexion sur ce qui ressort de nos rencontres et sur où on en est ; réflexion sur où l’on va et comment on y va, etc.

Je vous propose pour cela de partir de ce que Paul écrit sur la question de l’unité de l’Église en son temps, puisque c’est de cela qu’il est question dans le texte de la première Épître aux Corinthiens qui nous est proposé ce matin.

À travers les faibles et les forts, ceux qui sont sans loi et ceux qui sont sous la loi, c’est bien de la question de la pluralité de l’Église qu’il est question, incluant les jugements des uns sur les autres que cela entraîne, les uns s’estimant forts face aux autres qu’ils jugent faibles. Notons que Paul qui reprend ce vocabulaire à plusieurs reprises, et spécifiquement, de façon bien développée, dans ses lettres aux Corinthiens et aux Romains, se garde bien de jamais dire qui sont les faibles et qui sont les forts — tant il va de soi que les forts c’est nous, et les faibles, c’est les autres.

Il est question quoiqu’il en soit de la pluralité, voire de la division dans l’Église — et cela autour de rites différents.

En l’occurrence autour de ce qu’on a le droit de manger — pour ceux qui sont sans loi (ou ailleurs chez Paul, les Grecs) — et de ce qu’on s’interdit de manger — pour les juifs, qui (à l’époque, c’était tout à fait possible sans poser de problème), fussent-ils croyants au Christ, n’en continuaient pas moins, selon la loi de Moïse, à manger casher.

Voilà qui posait un problème dans l’Église : peut-on communier ensemble, juifs et non-juifs, puisque devant être séparés par l’interdit alimentaire ?

Ce qui nous renvoie, pour s’en tenir à nos jours, au problème équivalent qui est le cœur de la division de nos Églises aujourd’hui, l’impossibilité de communier ensemble. Impossibilité qui est un fait (j’y reviens) et un signe. Signe de ce que notre communion n’est pas (encore) totale, même si elle existe — et, concernant les évangéliques avec lesquels elle est possible, elle n’est pas toujours sans arrière-pensées (sur qui est faible et qui est fort).

Signe de ce que notre communion n’est pas encore totale : cela concerne notamment, chez les évangéliques, ceux qui sont strictement baptistes, sans concession ; c’est-à-dire qui, niant la validité du baptême des enfants, en tirent la conséquence qu’ils ne peuvent pas communier avec ceux qui n’ont pas été baptisés sur profession personnelle de la foi, et, en outre, pour être précis sur cet aspect de la rigueur de ceux là, par immersion.

Cela pour certains parmi les évangéliques avec lesquels nous avons prié ce mois de janvier — ce qui n’empêche par une réelle fraternité, au-delà de ces signes. Il en est de même concernant l’impossibilité de communier avec les catholiques. Ici, c’est un fait disciplinaire.

L’excommunication (qui veut dire précisément l’exclusion de la communion) portée par Rome au XVIe siècle sur les Réformateurs, nommément sur Luther et Calvin, et sur ceux qui les suivent (c’est-à-dire nous), cette excommunication n’a toujours pas été levée.

Certes on y travaille, c’est un aspect non-négligeable de l’œcuménisme, sans doute le combat actuel de l’œcuménisme, mais le travail n’est pas terminé. C’est la raison pour laquelle je préfère personnellement m’abstenir en attendant, en le regrettant, malgré l’accueil qui peut m’être offert comme occasionnellement. Il me semble que cela correspond à ce que propose Paul (on y vient). Cela tout en comprenant les protestants et parmi eux ceux de mes collègues pasteurs qui ont choisi le geste en quelque sorte prophétique de bousculer les impossibilités actuelles en en faisant volontairement fi. Il me semble que l’abstention présente l’avantage de signifier clairement l’état actuel de la question : là où on en est. Alors, où en est-on ?

Il y a en premier lieu des problèmes d’interprétation de la présence réelle du Christ à la Cène, quasiment résolus ceux-là :
nous nous accordons à admettre qu’en prenant de ce pain et en buvant de cette coupe après qu’aient été prononcées les paroles du Christ, nous avons communion à son corps et à son sang, qui ont été signifiés par ses paroles — qui requièrent qu’on les croie.

La façon dont s’effectue cette communion a été l’objet de longs débats philosophiques sur ce qu’est la substance, sur la façon dont on y a part (on connaît le vocabulaire : transsubstantiation, consubstantiation, présence réelle non locale, présence symbolique, etc.). On s’accorde plus ou moins aujourd’hui sur le fait que le débat et le vocabulaire relèvent largement de choix philosophiques qui n’ont pas grand chose à voir avec les textes du Nouveau Testament.

Les choses sont moins simples quant à la question de la « rémanence » : l’Église catholique considérant qu’une fois les paroles du Christ prononcées sur les éléments, ils demeurent corps et sang du Christ même après la cérémonie (d’où les tabernacles pour conserver les hosties dans les églises catholiques).

Mais le véritable point à dépasser, et qui n’est pas dépassé jusqu’à présent est celui du pouvoir de consacrer les éléments, qui pour l’Église catholique, n’appartient qu’à un prêtre en communion avec l’évêque de Rome, qui en reconnaît l’autorité et en reçoit pouvoir.

Dès lors l’Eucharistie consacrée par un ministre non-catholique romain n’est pas valable, et la foi requise aux paroles du Christ prononcées sur les éléments est aussi foi requise en l’autorité de l’Église romaine. Autrement dit, si un quidam prononçait les paroles de consécration, cela n’aurait aucun sens, même s’il avait des fidèles pour le croire.

Je n’ai parlé que de nos relations avec les évangéliques et les catholiques romains. Et concernant particulièrement ces derniers, du fait que le chemin de la réconciliation n’est pas achevé.

Il y a ailleurs des signes d’avancée non négligeable. Par exemple, il faut savoir que réformés et anglicans reconnaissent réciproquement la validité de leur consécration respective de l’Eucharistie ou de la Sainte Cène.

Avec les catholiques cela avance aussi. Cela a avancé sur bien des points, comme, en 1999, l’accord luthéro-catholique sur la justification, qui quoique imparfait, a le mérite d’exister. Et je ne désespère pas de voir des avancées rapides sur le point de la communion à la Cène que je viens d’évoquer : Dieu a toujours des ressources pour nous surprendre.

*

Mais on n’en est pas encore là. Et la question qui se pose donc en attendant, c’est que faire donc ? — surtout si on est légitimement pressé de voir ces querelles, qui ont parfois des allures de queues de cerises, prendre fin.

Que faire ? Eh bien à mon sens, il n’y a pas de recette, mais il y a quelques éléments d’orientation (et je ne parle pas du fond du travail œcuménique, mais du comportement concret en attendant ses aboutissements les plus concrets). Et des éléments d’orientation concernant nos comportements concrets en attendant me semblent se trouver, très pertinents, dans les indications de Paul.

*

« Je me suis fait tout à tous ». Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Paul nous l’indique dans le reste de son Épître lorsqu’il revient à cette question concernant les nourritures casher et les repas partagés (ch.11, développant son ch. 8 dont notre texte est une suite ; et il développe la même chose dans l’Épître aux Romains, ch. 14). Concrètement Paul invite à s’abstenir de nourriture non-casher, tout en expliquant qu’il n’y a aucun obstacle théorique à en consommer.

J’explique : la casherout est perçue par lui comme un pur symbole. Symbole du refus des idoles auxquelles sont consacrées les viandes courantes dans l’Empire romain d’alors : un romain, fût-il chrétien achète sur le marché des viandes consacrées et du vin offert en libations aux dieux romains, inexistants selon Paul — « il n’y a pas d’idoles » souligne-t-il (1 Co 8).

Ce refus des idoles est précisément une des choses que veut signifier la casherout, qui consiste à consacrer viandes et vin au Dieu unique. Du coup un juif, croirait-il au Christ, s’abstient de viandes non-casher.

Question : comment faire quand il s’agit de signifier l’unité juifs-païens à la Sainte Cène, partagée au cours d’un repas ? Paul reprochera à Pierre (dans son Épître aux Galates) — Pierre qui a donc manifestement tiré les mêmes conclusions que lui sur l’indifférence des nourritures non-casher —, Paul lui reprochera de participer aux repas, et donc à la communion, non-casher de païens d’un côté quand les juifs sont absents, et à celle casher de l’autre quand ils sont là.

Et on a là l’explication de l’invitation de Paul à s’abstenir : pour maintenir l’unité, juifs comme païens, mangez donc toujours casher en sachant que vous pourriez théoriquement faire le contraire. Abstenez-vous par égard pour ceux qui sont convaincus de devoir s’abstenir, qui seraient donc de fait « excommuniés », par une Cène célébrée au cours d’un repas non-casher.

Cela dit, que celui qui mange non-casher ne juge pas celui qui ne mange pas, et que celui qui ne mange pas, c’est-à-dire qui ne mange que casher, ne condamne pas celui qui mange non-casher.

Bref, si l’on transpose aujourd’hui, le « je me suis fait tout à tous » pourrait se traduire ainsi : dans la mesure où l’excommunication n’est pas levée, et même si ça me gêne, je m’abstiens, par solidarité, par égard pour le quotidien ordinaire où les choses fonctionnent ainsi, mais ne jugez pas défavorablement, ne condamnez pas ceux qui, par souci de bousculer le statu quo,… font comme si l’excommunication était déjà levée en communiant malgré tout. (D’autant plus que pour Paul, s’abstenir débouchait concrètement sur la possibilité de communier ensemble, tandis qu’aujourd’hui c’est l’inverse !)

Bref. Il n’y a pas de quoi en faire un fromage — après communion et avant dessert. Il s’agit simplement de savoir clairement comment on fait, et de le faire dans la fraternité et sans juger ni a fortiori condamner quiconque. Cela en sachant que tant que les choses ne seront pas réglées au niveau… « disciplinaire », les choses resteront compliquées. Il s’agit donc de faire pression œcuménique, et notamment sur la hiérarchie catholique, puisque côté protestant, la position officielle est celle de la table ouverte, pour que la communion spirituelle puisse être enfin signifiée dans le repas qui est censée la signifier !




R.P.
Après les prières pour l'Unité de janvier


 

 

12:35 Écrit par rolpoup dans Dimanches & fêtes | Lien permanent | Commentaires (0)

22 janvier 2006

Le temps est accompli

 
 
  

LE TEMPS EST ACCOMPLI



 

 


 
  

Marc 1, 14-20
14  Après que Jean eut été livré, Jésus vint en Galilée. Il proclamait l’Évangile de Dieu et disait :
15  "Le temps est accompli, et le Règne de Dieu s’est approché : convertissez-vous et croyez à l’Évangile."
16  Comme il passait le long de la mer de Galilée, il vit Simon et André, le frère de Simon, en train de jeter le filet dans la mer : c’étaient des pêcheurs.
17  Jésus leur dit : "Venez à ma suite, et je ferai de vous des pêcheurs d’hommes."
18  Laissant aussitôt leurs filets, ils le suivirent.
19  Avançant un peu, il vit Jacques, fils de Zébédée, et Jean son frère, qui étaient dans leur barque en train d’arranger leurs filets.
20  Aussitôt, il les appela. Et laissant dans la barque leur père Zébédée avec les ouvriers, ils partirent à sa suite.


*
 

« Le temps est accompli », proclame Jésus dès le début de son ministère. Quel est le temps qui est accompli ? Qu’est-ce que cela signifie ? « Le Règne de Dieu s’est approché ».
 
Nous voilà au bout d’une longue marche : « le temps est accompli ». Une longue marche, commencée au début de la Création, comme projet de Dieu, et pour nous humains, un projet à accompagner, à développer — car c’est nous que Dieu envoie pour dire son salut au monde. Un projet de sortie des ténèbres et du chaos vers la lumière de la gloire de la Cité future.
 
Figurez-vous que, à côté de l’Évangile de ce jour où la vocation des disciples qui commence par cette affirmation de ce Jésus sur le temps qui est accompli — à côté de ce texte du jour, les textes qui sont proposés à notre méditation pour cette semaine de prière pour l’unité des chrétiens nous situent précisément dans la perspective de ce pèlerinage dans lequel Dieu lance dès les origines l’humanité pour l’accomplissement de son projet.
 
Ce projet qui prend forme pour l’humanité comme sortie, comme Exode, nous envoie dans les lectures de cette semaine de l’Unité, à ce départ qui est le livre biblique de l’Exode, et à la promesse de la Cité De Dieu du livre de Apocalypse, où il prend sa forme finale :
 
Lisons ces textes :
Exode 40, 1-4 & 34-38
1  Le SEIGNEUR adressa la parole à Moïse:
2  "Au premier mois, le premier jour du mois, tu dresseras la demeure de la tente de la rencontre.
3  Tu y mettras l’arche de la charte et tu masqueras l’arche derrière le voile.
4  Tu apporteras la table et tu en arrangeras la disposition. Tu apporteras le chandelier et tu allumeras ses lampes.
 
34  La nuée couvrit la tente de la rencontre et la gloire du SEIGNEUR remplit la demeure.
35  Moïse ne pouvait pas entrer dans la tente de la rencontre, car la nuée y demeurait, et la gloire du SEIGNEUR remplissait la demeure.
36  Quand la nuée s’élevait au-dessus de la demeure, les fils d’Israël prenaient le départ pour chacune de leurs étapes.
37  Mais si la nuée ne s’élevait pas, ils ne partaient pas avant le jour où elle s’élevait de nouveau.
38  Car la nuée du SEIGNEUR était sur la demeure pendant le jour mais, pendant la nuit, il y avait en elle du feu, aux yeux de toute la maison d’Israël, à toutes leurs étapes.
 
Apocalypse 22, 1-5
1  Puis il me montra un fleuve d’eau vive, brillant comme du cristal, qui jaillissait du trône de Dieu et de l’agneau.
2  Au milieu de la place de la cité et des deux bras du fleuve, est un arbre de vie produisant douze récoltes. Chaque mois il donne son fruit, et son feuillage sert à la guérison des nations.
3  Il n’y aura plus de malédiction. Le trône de Dieu et de l’agneau sera dans la cité, et ses serviteurs lui rendront un culte,
4  ils verront son visage et son nom sera sur leurs fronts.
5  Il n’y aura plus de nuit, nul n’aura besoin de la lumière du flambeau ni de la lumière du soleil, car le Seigneur Dieu répandra sur eux sa lumière, et ils régneront aux siècles des siècles.


*


Dans le temps de notre pèlerinage, signifié par la pérégrination de l’Exode, vers la réconciliation du monde, cette réconciliation promise dans l’Apocalypse — dans ce temps de pèlerinage, Dieu nous est présent, pèlerin avec nous, dans la Tente de la rencontre.
 
Il nous est présent de façon voilée, comme dans une nuée qui nous accompagne, et depuis laquelle nous sommes guidés, comme par la lumière du chandelier de la Tente de la rencontre.
 
On retrouve ce chandelier dans l’Apocalypse, qui souligne ce qu’il signifie. Je cite : Apoc 4, 5 « Devant le trône brûlent sept lampes ardentes, qui sont les sept esprits de Dieu. » C’est ainsi que le livre de l’Apocalypse nous apprend que le chandelier à sept branches accompagne, comme le peuple juif, le peuple chrétien dans sa marche ; il est au cœur du culte de l’Église primitive, symbole de l’Esprit saint qui nous guide :
 
La Gloire de Dieu est présente, au cœur de notre provisoire édifice, comme édifice de toile, celui de notre vie passagère. Le Royaume de Dieu comme caché, mais tout proche.
 
La gloire de Dieu nous dirige, nous fait avancer, nous reposer et avancer encore. Mais comme Moïse ne pouvait pas entrer au cœur brûlant de la Gloire du Seigneur, nous n’avons pas accès au cœur du mystère de notre être, comme au cours d’un pèlerinage… Personne n’a jamais vu Dieu. Seul le Fils unique est dans le sein du Père pour nous le fait connaître.
 
Mais cependant, tout au long de ce pèlerinage il est là, silencieux, mystérieux, qui préside à nos marches et à nos haltes, nuée pendant le jour, flambeau durant nos nuits.
 
Comment signifierons-nous au monde cette présence que nul n’a jamais vue, qui nous guide mais ne se voit pas, qui ne se verra pas — sinon par l’unité de notre marche à son ombre et à sa lumière ?

Dans le temps de notre pèlerinage, signifié par la pérégrination de l’Exode, vers la réconciliation du monde, cette réconciliation promise dans l’Apocalypse — dans ce temps de pèlerinage, Dieu nous est présent, pèlerin avec nous, dans la Tente de la rencontre. Il nous est présent de façon voilée, comme dans une nuée qui nous accompagne, et depuis laquelle nous sommes guidés, comme par la lumière du chandelier de la Tente de la rencontre. On retrouve ce chandelier dans l’Apocalypse, qui souligne ce qu’il signifie. Je cite : Apoc 4, 5 « Devant le trône brûlent sept lampes ardentes, qui sont les sept esprits de Dieu. » C’est ainsi que le livre de l’Apocalypse nous apprend que le chandelier à sept branches accompagne, comme le peuple juif, le peuple chrétien dans sa marche ; il est au cœur du culte de l’Église primitive, symbole de l’Esprit saint qui nous guide : La Gloire de Dieu est présente, au cœur de notre provisoire édifice, comme édifice de toile, celui de notre vie passagère. Le Royaume de Dieu comme caché, mais tout proche. La gloire de Dieu nous dirige, nous fait avancer, nous reposer et avancer encore. Mais comme Moïse ne pouvait pas entrer au cœur brûlant de la Gloire du Seigneur, nous n’avons pas accès au cœur du mystère de notre être, comme au cours d’un pèlerinage… Personne n’a jamais vu Dieu. Seul le Fils unique est dans le sein du Père pour nous le fait connaître. Mais cependant, tout au long de ce pèlerinage il est là, silencieux, mystérieux, qui préside à nos marches et à nos haltes, nuée pendant le jour, flambeau durant nos nuits. Comment signifierons-nous au monde cette présence que nul n’a jamais vue, qui nous guide mais ne se voit pas, qui ne se verra pas — sinon par l’unité de notre marche à son ombre et à sa lumière ?


*


Au livre de l’Apocalypse nous est dévoilée l’espérance de la plénitude de la lumière. Le terme du pèlerinage de notre Exode est atteint. La terre promise, Jérusalem, est atteinte, d’où sourd la vie, comme un fleuve d’eau vive.
 
L’arbre de vie, notre nourriture, est enfin dévoilé. Quelle est, jusque là, cette nourriture de notre unité ?
 
Le Seigneur Dieu est présent au cœur de la Cité éternelle, lui qui est dès les origines est au cœur de nos êtres.
 
De ce cœur la Cité rayonne sa lumière qui rend désormais inutile toute autre lumière… Mais nul ne le voit — sinon dans la figure de « l’agneau qui est au milieu du trône », figure symbolique de celui, Jésus, qui est seul venu dévoiler celui dont la lumière empêche de le voir — « Personne n’a jamais vu Dieu ; Dieu Fils unique, qui est dans le sein du Père, nous l’a dévoilé » (Jn 1, 18).


*
 

Un agneau, rappel de "l'agneau de Dieu qui ôte le péché du monde", réminiscence d'Ésaïe 53. Mais plus que ce seul texte, c'est l'essentiel du contenu des chants du Serviteur d'Ésaïe, qui pour une large part, s'accomplit en Jésus, l'Agneau de Dieu.
 
« Agneau de Dieu. » C'est en s'identifiant au peuple pécheur, que Jésus ôte le péché du monde. C'est en être faible et sans force (Es 49:4) au sein d'un peuple opprimé, affaibli, sans force, que le Serviteur du livre d'Ésaïe reçoit de la faveur de Dieu, qui est sa force (v.5), l'investiture qui en fait son porte-parole jusqu'aux extrémités de la Terre (Es 49:5-6).


*
 

Un agneau, rappel, par-delà Ésaïe, du repas de la Pâque où s’origine notre Exode vers la rencontre. Repas de communion, ainsi en celui qui seul dévoile le Père que nul n’a jamais vu.
 
Repas signe de vie éternelle, de ce fruit de l’arbre de vie qui guérit les nations. C’est le repas espéré de notre unité scellée.
 
Quand saurons-nous le prendre ensemble, ce repas que nous avons pris ensemble aux origines, comme peuple au sortir de la captivité pour sa marche vers la terre promise. Puis les chemins ont divergé — les aléas de la route.
 
Mais des pas s’accomplissent… Déjà anglicans, qui ont reçu la Réforme certes, mais dont l’Église est de structure catholique classique, anglicans et réformés sont en inter-communion. Nous avons changé notre vocabulaire pour désigner les différentes façons de dire le Christ des Églises orientales. D’autres Églises encore ont avancé sur ce chemin cahoteux… Un accord sur la justification à été conclu en 1999 entre luthériens et catholiques. Nous sommes ensemble aujourd’hui dans une cathédrale catholique. Aurait-ce été possible il n’y a que quelques années ?
 
Nous sommes encore au temps des carrefours et des intersections.
 
Si nous savons cela, si nous y réfléchissons, nos divergences peuvent devenir le moteur et le signe de notre prière — celle de Jésus : « que tous soient un » — pour que nos chemins, qui convergent de toute façon vers l’unique Terre promise, nous permettent bientôt de partager le repas qui dessine notre espérance de la Table future du Royaume de Dieu.


*


Mais je viens de donner l’impression que tout cela nous renvoie au futur, à un futur plus ou moins hypothétique !
 
« Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux » (Mt 18, 20) — tel est le mot d’ordre à côté des textes de l’Exode et de l’Apocalypse pour la prière de l’unité de cette année 2006. Que nous dit Jésus de la sorte ? Est-ce du seul futur que relève sa promesse ?
 
« Le temps est accompli, et le Règne de Dieu s’est approché : convertissez-vous et croyez à l’Évangile. » Aujourd’hui, aujourd’hui précisément. Le Royaume de Dieu s’est approché. C’est ce qu’il s’agit de dire. « Le temps se fait court — la figure de ce monde passe» dira Paul aux Corinthiens (1 Co 7, 29 & 31).
 
C’est bien ce qu’ont entendu les premiers disciples : Simon et André : « Laissant aussitôt leurs filets, ils le suivirent ». Puis Jacques et Jean : « il les appela. Et laissant la barque de leur père, ils partirent à sa suite »…
 
C’est en ces termes que la vocation adressée aux premiers disciples nous est adressée à notre tour : « Le temps est accompli, et le Règne de Dieu s’est approché : convertissez-vous et croyez à l’Évangile. »
 
Entendrons-nous cet appel, qui nous presse à présent à l’unité — ou resterons nous chacun dans sa barque et à nos filets ? « Laissant aussitôt leurs filets, ils le suivirent. » — « Laissant la barque de leur père, ils partirent à sa suite »… À nous à présent…
 


R.P.
Semaine de prière pour de l’unité des chrétiens,
21-22.01.2006  
 
 


 

09:55 Écrit par rolpoup dans Dimanches & fêtes | Lien permanent | Commentaires (0)

08 janvier 2006

Épiphanie


 

L’ADORATION

DES MAGES  



 




Matthieu 2, 1-12
1  Jésus étant né à Bethléem de Judée, au temps du roi Hérode, voici que des mages venus d'Orient arrivèrent à Jérusalem
2  et demandèrent : "Où est le roi des Judéens qui vient de naître ? Nous avons vu son astre à l'Orient et nous sommes venus lui rendre hommage."
3  A cette nouvelle, le roi Hérode fut troublé, et tout Jérusalem avec lui.
4  Il assembla tous les grands prêtres et les scribes du peuple, et s'enquit auprès d'eux du lieu où le Messie devait naître.
5  "A Bethléem de Judée, lui dirent-ils, car c'est ce qui est écrit par le prophète :
6  Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n'es certes pas le plus petit des chefs-lieux de Juda : car c'est de toi que sortira le chef qui fera paître Israël, mon peuple."
7  Alors Hérode fit appeler secrètement les mages, se fit préciser par eux l'époque à laquelle l'astre apparaissait,
8  et les envoya à Bethléem en disant : "Allez vous renseigner avec précision sur l'enfant; et, quand vous l'aurez trouvé, avertissez-moi pour que, moi aussi, j'aille lui rendre hommage."
9  Sur ces paroles du roi, ils se mirent en route; et voici que l'astre, qu'ils avaient vu à l'Orient, avançait devant eux jusqu'à ce qu'il vînt s'arrêter au-dessus de l'endroit où était l'enfant.
10  À la vue de l'astre, ils éprouvèrent une très grande joie.
11  Entrant dans la maison, ils virent l'enfant avec Marie, sa mère, et, se prosternant, ils lui rendirent hommage ; ouvrant leurs coffrets, ils lui offrirent en présent de l'or, de l'encens et de la myrrhe.
12  Puis, divinement avertis en songe de ne pas retourner auprès d'Hérode, ils se retirèrent dans leur pays par un autre chemin.



Les Mages. Ils disent la manifestation de Dieu, en l’occurrence manifestation aux nations, à tous, “manifestation” selon le sens du terme issu du grec, “épiphanie”. Commémoration de la naissance de la lumière à Noël : la voilà comme à son zénith. Le Royaume, ici, se fait plus proche.
 
 
Les Mages et l'Histoire
 
On sait ce qu'il en est de ces Mages. Les Mages étaient la caste sacerdotale dans l’Empire perse (donc prêtres plutôt que rois — ils sont devenus rois, "rois-mages", au regard des textes des Psaumes et d’Ésaïe —, et pas nécessairement trois — ça, ça vient du nombre de leurs cadeaux, avant de désigner les trois continents — le monde entier d’alors — qu’ils en viendront à représenter : Afrique, Asie, Europe). Des prêtres, au départ, de la caste sacerdotale des Mages, chez les Perses, de religion mazdéenne — comme les Lévites pour les Hébreux.
 
La religion mazdéenne existe toujours, qui se réclame du prophète Zoroastre (ou Zarathoustra), prophète de Ahura Mazda (comme les mazdéens nomment Dieu). C’est la dynastie des Achéménides, rois des Mèdes et des Perses dont était le célèbre Cyrus, qui l’adopta. Sous son petit-fils Darius Ier (Ve siècle av. J.-C.), le zoroastrisme est la religion en place. Après lui, son fils Xerxès Ier, puis Artaxerxès Ier (qui régna de 465 à 425 av. J.-C.) en furent aussi des fidèles (tous ces rois sont mentionnés dans plusieurs livres de la Bible : Esdras, Néhémie, Daniel, Aggée, Zacharie, Esther…). Sous leurs règnes s'opéra sans doute une synthèse des enseignements de Zoroastre et de la tradition antécédente. Artaxerxès II (qui régna de 404 à 358 av. J.-C.) vénérait Ahura Mazda, Mithra et Anahita. Le mazdéisme est resté la religion de l’Iran durant douze siècles, jusqu’à sa conversion à l’islam à partir du VIIe siècle ap. J.-C.
 
Cette religion, en outre dualiste (où s’opposent le Bien — Ahura Mazda, ou Ormuzd, — et le Mal — Ahriman), et qui, suite à la réforme de Zoroastre, est globalement monothéiste ; cette religion a des racines communes avec l’hindouisme, et donc aussi le bouddhisme. Et ses prêtres, ainsi dotés d’une représentativité universelle, sont les Mages.
 
On voit donc dans notre texte ces Mages informés, apparemment au travers de pratiques astrologiques, de la venue en ce monde d'un roi des Judéens. L'aspect étrange semble s’épaissir : on sait que les premiers chrétiens, comme le judaïsme, rejettent l'astrologie, perçue comme déterministe et s'opposant donc à la liberté des enfants de Dieu.
 
(Aujourd'hui, de plus, après les progrès de l'astronomie moderne depuis Copernic, l'astrologie est dépouillée de tout crédit scientifique ; y compris sous l'angle où — ce depuis le XXe siècle — la science aussi rejette le "déterminisme", l'idée que les choses seraient déterminées à fonctionner de façon immuable et prévisible, ce qui rejoint les raisons qui étaient celles des premiers chrétiens pour rejeter l'astrologie).
 
Bref. Mais alors qu'en est-il de ce texte ?
 
 
Signe de miséricorde
 
Nulle justification de l'astrologie, évidemment : ici, c’est Dieu qui fait apparaître un reflet de sa gloire jusqu'aux parages confus d’une sagesse déficiente comme le sont finalement toutes les sagesses humaines. Comme l'a écrit Paul, par la folie de la croix, "Dieu n'a-t-il pas frappé de folie la sagesse du monde ?" (1 Co 1, 20).
 
Dieu condescend à faire luire un reflet de lumière, à donner un signe jusqu'aux marges de la confuse astrologie (marges, car en fait, ce n’est pas exactement d’astrologie, pas au sens où on l’entend aujourd’hui, qu’il s’agit, mais, on va le voir, de prophétie mazdéenne, qui incluait une référence aux astres). Un signe, que selon leur croyance, ces Mages discernent : un roi des Judéens est né.
 
Un roi des Judéens, les Mages vont donc chez Hérode : normal, il s'agit du roi de Judée en place, ils vont à la famille royale. Et c'est alors la prophétie de l'Écriture juive qui éclairera plus précisément leur chemin : ce sera Bethléem.
 
L'étoile réapparaît alors — v.10 : "à la vue de l'étoile, ils éprouvèrent une grande joie" — comme un dernier clin d’œil.
 
Mais attention, ici les choses, parlant de prophétie, prennent une tournure inattendue. Matthieu, on le sait, bâtit son récit de l’Enfance sur les prophéties de la Bible hébraïque. Et voilà que, chose étonnante, il y introduit une prophétie issue d’une autre religion ! 
 
 
Une autre prophétie
 
Des Mages aux prises avec un roi qui veut les utiliser — ici contre un rival royal potentiel. Des Mages conduits où ils ne voulaient pas aller, de Jérusalem à Bethléem…
 
Où l’on retrouve un épisode parallèle dans le livre des Nombres, et qui n’est pas sans éclairer celui des Mages : Balaam. Comme les Mages, "Balaam s'en alla et retourna dans son pays ; et Balaq s'en alla de son côté." (Nb 24, 25) — comme Hérode du sien. Balaam est un genre de devin, comme les Mages. Balaq lui demande de maudire Israël, comme Hérode qui dans la suite du texte, en massacrera les enfants. Et poussé par Dieu, que lui répond Balaam le devin ? — "Il n'y a pas d'augure en Jacob, ni de divination en Israël : en temps voulu il est dit à Jacob, à Israël, ce que Dieu fait." (Nombres 23, 23) Et voici ce qu’annonce Dieu par Balaam : "Je le vois, mais ce n'est pas pour maintenant; je l'observe, mais non de près: De Jacob monte une étoile, d'Israël surgit un sceptre" (Nombres 24, 17).
 
Étoile annoncée par Balaam, et que rencontrerons les Mages qui lui ressemblent sous l’angle où comme lui, ils sont des prophètes païens. Étoile qui est Jésus.



C’est sans doute par ce type de biais qu’est introduit dans la tradition chrétienne ce qui est connu à l’époque comme une véritable prophétie étrangère, zoroastrienne.
 
L'Évangile arabe de l'Enfance, un texte apocryphe arabe de source syriaque affirme : —Zoroastre, qu’il identifie justement à Balaam — Zoroastre annonça, je cite (ch. 1, v.2), que :
 
"La vierge sera enceinte sans avoir connu d’homme [...]. Son enfant par la suite ressuscitera des morts ; et sa bonne nouvelle [sera connue] dans les sept climats de la terre" ; cela avec pour signe une étoile. Et plus loin, le même texte (ch. 5, v1) : "Des Mages arrivèrent d'Orient à Jérusalem, selon ce que Zoroastre avait prédit".
 
Eh bien ! cette prophétie est connue par ailleurs. L’historien des religions Salomon Reinach, dans son Histoire Générale des Religions rappelle l'essentiel des croyances mazdéennes à ce sujet. Je cite : "À la fin des siècles, Ahura Mazda engagera une lutte décisive contre Ahriman et l'emportera grâce à l'archange Sraoscha (l'obéissant), vainqueur du démon Ashéma. Une Vierge concevra alors de Zoroastre un Messie, le Victorieux, le second Zoroastre qui fera ressusciter les morts et d'abord le premier mort, l'homme primitif : Gayomart."
 
Les historiens précisent en outre qu'en Iran oriental des Mages astrologues se recueillaient chaque année sur une montagne pour y guetter durant trois jours — c’est une partie de leur culte — l'étoile du grand roi.


*


Du coup, pour étrange qu'il nous apparaisse, notre récit sur les Mages prend tout un sens. Dans le cadre de leur attente mazdéenne, des zoroastriens à Jérusalem ? Eh bien, c’est tout à fait envisageable ! L'attente messianique juive dépassait alors largement les frontières d'Israël. Depuis longtemps, des contacts étaient noués entre Israël et les peuples où il a été dispersé. La Bible est alors traduite en grec depuis deux siècles !
 
Le contact est plus particulièrement étroit avec les pensées les plus proches de le religion du Dieu unique (ainsi Paul et les philosophes d'Athènes — Ac 17). Mais aussi une religion comme le zoroastrisme — la religion des Mages, donc.
 
Un signe des temps, ces temps annoncés par Ésaïe, et dont Paul deviendra le grand annonciateur. Voilà un Dieu qui accompagne ceux qui cherchent son salut, même païens, même de façon confuse, jusque dans leur démarche confuse. Un Dieu qui prend le risque de frayer sur les chemins de ce monde, qui prend le risque de l'Incarnation, pour mener ce monde, pour mener la chair, jusqu'à la folie de la rencontre d’un enfant, qui est en fait le fils de Dieu.
 
Un enfant humble de parents humbles chez qui entrent de prestigieux prêtres étrangers, déposant aux pieds de l'infini mystère la richesse de leur or, l'encens de leurs prières, et la myrrhe qui parfume les vivants et les morts. À nous de les y accompagner.
 
Le message de Dieu a rompu les frontières : c'est le mystère que nous fêtons : Dieu est manifesté au monde. Il nous a accompagnés, et nous accompagne dans les méandres de nos réalités afin que nous vivions de sa seule grâce au cœur du monde où nous frayons.
 
 
Le chemin de Dieu
 
Car voilà que face à la recherche de la sagesse, Dieu a opposé la folie de sa présence dans un enfant ; la foi miraculeuse à la faiblesse d’un enfant. À ce point, c’est à nous d’emboîter le pas des Mages et de leur histoire étrange.
 
Rappelez-vous (v.9-10) : « l'astre, qu'ils avaient vu à l'Orient, […] vînt s'arrêter au-dessus de l'endroit où était l'enfant. À la vue de l'astre, ils éprouvèrent une très grande joie. » « De Jacob monte une étoile » avait dit Balaam. Arrêtée au-dessus de l’enfant, l’étoile est le signe de sa provenance, céleste. Cet enfant vient des cieux à notre rencontre, sur nos chemins, même tortueux comme celui des Mages païens ; avec nous mystérieusement, comme la trace d’une étoile, jusqu’à ce carrefour où s’arrête l’étoile et où l’on repart « par un autre chemin ».
 
L’enfant était l’étoile, il est désormais le chemin. Nous n’avons pas eu le cheminement des Mages. Nous avons eu chacun les nôtres, ceux de nos espérances, de nos étoiles confuses, de nos religiosités, de nos soucis, de nos fardeaux, jusqu’à l’enfant, qui mystérieusement, nous a guidés et accompagnés jusque là. À présent l’étoile s’arrête, dévoilant l’enfant, nouveau chemin, lumineux, où nous sommes à présent envoyés avec lui... « un autre chemin »..

R.P.


 

 

12:55 Écrit par rolpoup dans Dimanches & fêtes | Lien permanent | Commentaires (0)