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14 mai 2006

Appelés enfants de Dieu





et nous le sommes








1 Jean 3
1 Voyez, quel amour le Père nous a donné, puisque nous sommes appelés enfants de Dieu! Et nous le sommes. Voici pourquoi le monde ne nous connaît pas: c’est qu’il ne l’a pas connu.
2 Bien-aimés, nous sommes maintenant enfants de Dieu, et ce que nous serons n’a pas encore été manifesté; mais nous savons que lorsqu’il sera manifesté, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu’il est.
[…]
16 A ceci, nous avons connu l’amour: c’est qu’il a donné sa vie pour nous. Nous aussi, nous devons donner notre vie pour les frères.
17 Si quelqu’un possède les biens du monde, qu’il voie son frère dans le besoin et qu’il lui ferme son cœur, comment l’amour de Dieu demeurera-t-il en lui?
18 Petits enfants, n’aimons pas en parole ni avec la langue, mais en action et en vérité.
19 Par là nous connaîtrons que nous sommes de la vérité, et nous apaiserons notre cœur devant lui,
20 de quelque manière que notre cœur nous condamne: Dieu est plus grand que notre cœur et connaît tout.
21 Bien-aimés, si notre cœur ne nous condamne pas, nous avons de l’assurance devant Dieu.
22 Quoi que ce soit que nous demandions, nous le recevons de lui, parce que nous gardons ses commandements et que nous faisons ce qui lui est agréable.
23 Et voici son commandement: Que nous croyions au nom de son Fils Jésus-Christ, et que nous nous aimions les uns les autres, selon le commandement qu’il nous a donné.
24 Celui qui garde ses commandements demeure en Dieu, et Dieu en lui; et nous reconnaissons à ceci qu’il demeure en nous, par l’Esprit qu’il nous a donné.


*


« Voyez quel amour le Père nous a donné, puisque nous sommes appelés enfants de Dieu. » Comment l’Épître en arrive-t-elle à une telle affirmation ? — : nous sommes appelés enfants de Dieu — du fait que Dieu nous a aimés, au point que l’Épître pourra dire finalement carrément : Dieu est amour / ou, selon la traduction, sans doute préférable, moins vague, de Chouraqui Dieu est chérissement : voyez quel amour le Père nous a donné, de quel amour il nous a chéris.

Rien d’évident dans une telle assertion — le Père nous a chéris —, sachant ce qu’est le monde, le cauchemar du monde — dont Dieu est tout de même le créateur ! —, sachant la haine de ce monde ennemi, que rappelle aussi l’Épître. Comment peut-on dire que Dieu nous aime, que Dieu est amour ?! Parole incroyable, ou, si on la prend au sérieux, une telle parole — le Père nous a aimés — pose ipso facto une mystérieuse souffrance en Dieu ; et effectivement ce qui fonde cette assertion, c’est qu’ « à ceci, nous avons connu l’amour: c’est qu’il a donné sa vie pour nous » (v. 16). La croix ! Amour égale, d’une façon ou d’une autre, souffrance.

Et en parallèle, non moins mystérieux, cette souffrance — exprimée à la croix, signe du don de sa vie — cette souffrance dans cet amour, fonde un détachement à l’égard du monde ; le détachement par la croix — « je ne suis plus dans le monde » disait Jésus pour ses disciples à l’approche de sa mort — détachement qui ouvre pour les disciples l’entrée dans l’amour de Dieu (« Nous aussi, nous devons donner notre vie pour les frères » — v. 16), — détachement, puisque, n’oublions pas, l’amour du monde est en opposition à l’amour de Dieu.

C’est tout cela que pose notre confession que Jésus est le fils de Dieu, manifestant Dieu comme Dieu-amour, Dieu qui nous chérit, donnant « sa vie pour nous » — ce qui atteste que Dieu nous reçoit comme ses enfants. Voilà qui demande éclaircissement.


*


Ainsi Dieu nous a aimés de sorte que nous sommes enfants de Dieu — réellement, précise l’Épître…, et cela ne se voit pas — tout comme, au regard de ce que sont les choses, il ne se voit pas que Dieu est amour.

C’est de la même sorte, donc, que nous sommes enfants de Dieu ; et que cela ne se voit pas, n’est pas encore clairement révélé — « nous sommes maintenant enfants de Dieu, et ce que nous serons n’a pas encore été manifesté ». Chose difficile à exprimer, qui correspond aussi au « pouvoir de devenir enfants de Dieu » du Prologue de l’Évangile de Jean, « pouvoir », c’est-à-dire « pas encore », « pas tout à fait ». En d’autres termes c’est là une réalité déjà avérée — « nous le sommes » —, déjà donnée à la foi au Ressuscité ; mais qui n’extrait pas du monde pour autant — chose déjà vraie, mais pas encore pleinement réalisée, comme le papillon et la chrysalide.

Ici « enfants de Dieu », ne veut évidemment pas dire simplement créatures, mais parle de filiation intérieure, ce don de la foi. Il s’agit de participation à la filiation du Ressuscité. Bref, nous sommes déjà ressuscités, mais le monde et tout ce qui fait son cortège de douleur et de malheur, qui prospèrent par le péché, persistent.

Où la dualité tragique nous traverse jusqu’au jour où « nous deviendrons semblables à lui », où ce que nous sommes réellement sera « clairement révélé ».

Ainsi Dieu nous a aimés de sorte que nous sommes enfants de Dieu — réellement, précise l’Épître…, et cela ne se voit pas — tout comme, au regard de ce que sont les choses, il ne se voit pas que Dieu est amour. C’est de la même sorte, donc, que nous sommes enfants de Dieu ; et que cela ne se voit pas, n’est pas encore clairement révélé — « nous sommes maintenant enfants de Dieu, et ce que nous serons n’a pas encore été manifesté ». Chose difficile à exprimer, qui correspond aussi au « pouvoir de devenir enfants de Dieu » du Prologue de l’Évangile de Jean, « pouvoir », c’est-à-dire « pas encore », « pas tout à fait ». En d’autres termes c’est là une réalité déjà avérée — « nous le sommes » —, déjà donnée à la foi au Ressuscité ; mais qui n’extrait pas du monde pour autant — chose déjà vraie, mais pas encore pleinement réalisée, comme le papillon et la chrysalide. Ici « enfants de Dieu », ne veut évidemment pas dire simplement créatures, mais parle de filiation intérieure, ce don de la foi. Il s’agit de participation à la filiation du Ressuscité. Bref, nous sommes déjà ressuscités, mais le monde et tout ce qui fait son cortège de douleur et de malheur, qui prospèrent par le péché, persistent. Où la dualité tragique nous traverse jusqu’au jour où « nous deviendrons semblables à lui », où ce que nous sommes réellement sera « clairement révélé ».


*


Car en attendant, qui prétendrait accomplir correctement ce que Dieu demande ? Nous l’avons entendu — ce détachement qui seul fonde l’amour : « Si quelqu’un possède les biens du monde, qu’il voie son frère dans le besoin et qu’il lui ferme son cœur », il manifeste par là être du monde — ne pas croire, ou pas tout à fait, que la vérité n’est pas de ce monde, qui, lui, est illusoire.

Eh bien, le fondement de l’amour / charité est la foi au Ressuscité, porte de la naissance au monde d’en haut — qui se traduit par un détachement des « biens » illusoires de ce monde (qui voudraient nous laisser comme prisonniers de notre chrysalide) — un détachement qui ne sera complet que lors de l’éclosion finale de l’être intérieur, enfant de Dieu. Ce détachement est concrétisé par ce signe de l’abandon des biens illusoires qu’est leur partage concret, « en action et en vérité ».

Attitude inverse à celle de Caïn (cité au v. 12 : « ne faisons pas comme Caïn, qui était du Malin et qui égorgea son frère » — Caïn dont le nom a comme racine « possession ». « Possession » des biens illusoires comme origine — dès le commencement — de la haine et du meurtre.

Être passé de la mort à la vie — détaché, dépossédé de ce monde — libère non « pas en parole ni avec la langue, mais en action et en vérité ».

C’est le critère de notre communion avec Dieu, de notre paix : aimer en vérité. Mais alors voilà qui peut être inquiétant, et pas du tout apaisant. En effet, qui prétendra être à la mesure ? Comment dans ce cas, notre conscience, notre cœur, ne nous condamneraient-il pas, au fond ?


*


Eh bien, « De quelque manière que notre cœur nous condamne : Dieu est plus grand que notre cœur ». Parole décisive quand « l’apaisement de notre cœur », quand notre paix devant lui, est en rapport avec ce critère de notre connaissance de la vérité qui est que nous gardions ses commandements.

Car apparemment, il y a là tout pour n’être pas suffisamment apaisés devant lui : garder ses commandements, « que nous nous aimions les uns les autres » ! Qui est à la mesure ?

Eh bien « de quelque manière que notre cœur nous condamne: Dieu est plus grand que notre cœur et connaît tout. »

Il y a là, dans cette connaissance, suffisamment pour que « notre cœur ne nous condamne pas, [et que nous ayons] de l’assurance devant Dieu » — puisque Dieu, en effet, est plus grand que notre cœur, plus grand que notre conscience qui aurait tout pour nous condamner. Il n’y a donc d’assurance qu’en Dieu, de conscience apaisée qu’en Dieu.

C’est ainsi que son commandement, le fondement de son commandement, est bien « que nous croyions au nom de son Fils Jésus-Christ ».

Une parole de Luther a bien exprimé cela : « […] à bon droit on attribue à la foi un pouvoir assez grand pour qu'elle puisse satisfaire aux exigences de tous les commandements et qu'elle nous justifie sans le concours d'aucune bonne œuvre. Car […] elle satisfait aux exigences du premier commandement qui prescrit : "Tu honoreras un seul Dieu." Quand vous ne seriez que bonnes œuvres des pieds à la tête, vous ne seriez quand même pas juste, vous n'honoreriez encore nullement Dieu et vous ne satisferiez pas aux exigences du tout premier d'entre les commandements. Car il n'est pas possible d'honorer Dieu sans lui reconnaître la véracité et toutes les qualités, comme il les possède d'ailleurs vraiment. C'est ce que ne fait aucune bonne œuvre, mais seule le fait la foi du cœur.
Aussi est-ce en elle seule que l'homme devient juste et satisfait aux exigences de tous les commandements. Car celui qui satisfait aux exigences du premier et du plus important d'entre les commandements, satisfera sûrement et aisément aux exigences de tous les autres commandements » (Traité de liberté du chrétien, éd. GF p. 214).

Alors l’autre partie de son commandement, « que nous nous aimions les uns les autres », devient, non pas parole impossible qui verrait à nouveau notre cœur nous condamner, mais expression de la liberté qui est dans la conscience libérée par celui qui est plus grand que notre conscience « et nous reconnaissons à ceci qu’il demeure en nous, par l’Esprit qu’il nous a donné. »

« SEIGNEUR, écoute ma prière, prête l’oreille à mes supplications, par ta fidélité, par ta justice, réponds-moi!
N’entre pas en jugement avec ton serviteur, car nul vivant n’est juste devant toi.
[…] Dès le matin, annonce-moi ta fidélité, car je compte sur toi. Révèle-moi le chemin à suivre, car je suis tendu vers toi.
SEIGNEUR, délivre-moi de mes ennemis ; Je me cache auprès de toi.
Enseigne-moi à faire ta volonté! Car c’est toi mon Dieu. Que ton Esprit me guide avec bienveillance sur un sol sans obstacle. » (Psaume 143, 1-2 & 8-10)

Esprit nous irriguant comme la sève du cep irrigue les sarments selon le texte de l’Évangile de ce jour, que nous lirons à présent :

Jean 15, 1-8 :
1 "Je suis la vraie vigne et mon Père est le vigneron.
2 Tout sarment qui, en moi, ne porte pas de fruit, il l’enlève, et tout sarment qui porte du fruit, il l’émonde, afin qu’il en porte davantage encore.
3 Déjà vous êtes émondés par la parole que je vous ai dite.
4 Demeurez en moi comme je demeure en vous! De même que le sarment, s’il ne demeure sur la vigne, ne peut de lui-même porter du fruit, ainsi vous non plus si vous ne demeurez en moi.
5 Je suis la vigne, vous êtes les sarments: celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là portera du fruit en abondance car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire.
6 Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment, il se dessèche, puis on les ramasse, on les jette au feu et ils brûlent.
7 Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez ce que vous voudrez, et cela vous arrivera.
8 Ce qui glorifie mon Père, c’est que vous portiez du fruit en abondance et que vous soyez pour moi des disciples.

C’est de la même façon que nous sommes déclarés enfants de Dieu, par la foi : « à qui croit en son nom, il a donné le pouvoir de devenir enfant de Dieu » (Jean 1, 12) — « Voyez, quel amour le Père nous a donné, puisque nous sommes appelés enfants de Dieu ! Et nous le sommes réellement ».


R.P.



12:45 Écrit par rolpoup dans Dimanches & fêtes | Lien permanent | Commentaires (0)

23 avril 2006

Comme pour l’envol d’un papillon…






JÉSUS SOUFFLA SUR EUX








Jean 20, 19-31
19 Le soir de ce même jour qui était le premier de la semaine, alors que, par crainte des Judéens, les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées, Jésus vint, il se tint au milieu d’eux et il leur dit : "La paix soit avec vous."
20 Tout en parlant, il leur montra ses mains et son côté. En voyant le Seigneur, les disciples furent tout à la joie.
21 Alors, à nouveau, Jésus leur dit : "La paix soit avec vous. Comme le Père m’a envoyé, à mon tour je vous envoie."
22 Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et leur dit : "Recevez l’Esprit Saint ;
23 ceux pour qui vous remettez les péchés, ils leur ont été remis. Ceux pour qui vous les soumettez, ils leur ont été soumis."
24 Cependant Thomas, l’un des Douze, celui qu’on appelle Didyme, n’était pas avec eux lorsque Jésus vint.
25 Les autres disciples lui dirent donc : "Nous avons vu le Seigneur !" Mais il leur répondit : "Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je n’enfonce pas mon doigt à la place des clous et si je n’enfonce pas ma main dans son côté, je ne croirai pas !"
26 Or huit jours plus tard, les disciples étaient à nouveau réunis dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vint, toutes portes verrouillées, il se tint au milieu d’eux et leur dit :
"La paix soit avec vous."
27 Ensuite il dit à Thomas : "Avance ton doigt ici et regarde mes mains; avance ta main et enfonce-la dans mon côté, cesse d’être incrédule et deviens un homme de foi."
28 Thomas lui répondit : "Mon Seigneur et mon Dieu."
29 Jésus lui dit : "Parce que tu m’as vu, tu as cru; bienheureux ceux qui, sans avoir vu, ont cru."
30 Jésus a opéré sous les yeux de ses disciples bien d’autres signes qui ne sont pas rapportés dans ce livre.
31 Ceux-ci l’ont été pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour que, en croyant, vous ayez la vie en son nom.



*

Les paraboles animalières me semblent particulièrement parlantes pour illustrer la résurrection. En l’occurrence les métamorphoses d’insectes. Ceux qui lisent ce blog ou qui étaient à Antibes la semaine dernière m’ont entendu parler de chenilles et de papillons, à propos de ce que la résurrection nous semble tellement impossible. Impossible ! Les disciples, et Thomas, en sont naturellement là. Une chenille peut-elle voler ? Non évidemment. Pas comme chenille. Mais… comme papillon…


*


Pour ne pas reprendre l’histoire de la chenille, je passerai à d’autres insectes, pour illustrer aujourd’hui deux choses : à la fois le thème de la résurrection et celui, de cette semaine, de la peur, de la crainte des disciples.


Quelques comparaisons entomologiques — « insectiformes » — : prenons la cigale : la cigale femelle - après l'accouplement, à l'aide de son ovipositeur, situé à l'extrémité de l'abdomen, incise l'écorce des arbres pour y pondre ses œufs. Une femelle peut pondre jusqu'à six cents œufs. Les jeunes sans ailes, appelés nymphes, éclosent après six semaines environ et tombent sur le sol où ils s'enfoncent de quelques centimètres. Se nourrissant de la sève des racines, ils se développent lentement. Il leur faut parfois plusieurs années pour arriver à maturité. Quand ils émergent enfin, ils grimpent sur le tronc, s'y fixent et muent. Les adultes émergent de leur enveloppe nymphale, sèchent en quelques heures, s’envolent, s'accouplent et se nourrissent de plantes jusqu'à ce qu'ils meurent environ un mois plus tard.


Environ un mois avant de disparaître. Comme, pour les disciples, pour en revenir à eux, le temps des apparitions du Christ, de Pâques à l’Ascension…

*

En attendant :
« Par crainte des Judéens, les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées, »
Puis ils vont passer de la crainte (des Judéens, de la part de ces Galiléens : pas des juifs ! - on n'est pas dans une querelle religieuse !) à la libération : « Jésus vint, il se tint au milieu d’eux et il leur dit : "La paix soit avec vous." »

Revenons à nos insectes :

Certains papillons, en présentant de fortes ressemblances avec d'autres espèces (mimétisme dit batésien), bénéficient d'une protection passive contre les prédateurs. Chez de nombreux papillons, la coloration des ailes joue un rôle dans la protection contre les prédateurs. Certaines espèces sont difficilement détectables dans leur environnement forestier grâce aux motifs complexes qui ornent leurs ailes.


Ils se cachent. Comme les disciples, qui vont ensuite passer de la crainte à la libération ; c’est-à-dire : à la Mission : « Jésus leur dit : "La paix soit avec vous. Comme le Père m’a envoyé, à mon tour je vous envoie." » - Recevez l’Esprit Saint : et déliez ceux qui sont liés – cf. Mt 16, 19.
Jésus souffla sur eux comme pour l’envol d’une cigale ou d’un papillon sortant de sa chrysalide. Souffle de l’Esprit…

« Recevez l’Esprit Saint ». Cet Esprit qui vient du Père seul, le Père l’envoie par Jésus à qui il a été remis. Ici s’ouvre la porte de la liberté à laquelle nous sommes invités à notre tour.

Et cette liberté est une question de pardon. D’où la réserve qu’il faut avoir quant à la traduction qui veut que Jésus dise aux Apôtres : « ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. » Comme si les Apôtres avaient pour mission de retenir captifs de leurs péchés certains de ceux à qui ils sont envoyés !

Les Apôtres sont envoyés pour communiquer la libération que Jésus vient de leur octroyer dans le don de l’Esprit saint. De la communiquer abondamment. Pas de la mégoter.

Il se trouve qu’une toute autre traduction de cette parole est possible, que je crois devoir proposer : « ceux pour qui vous remettez les péchés, ils leur ont été remis. Ceux pour qui vous les soumettez, ils leur ont été soumis ».

Voilà donc qui donne tout autre chose : remettre les péchés et les soumettre. Deux faces de la libération. Remettre les péchés, c’est pardonner, soumettre les péchés, c’est permettre de les dominer. Être libéré du fruit du péché.

*

Thomas, lui, n’était pas là. Ils disent avoir vu. Mais y a-t-il un rapport entre ce qu’ils ont vu et le Crucifié ? Après tout : c’est cela que Thomas veut savoir.

Si l’on n’assiste pas à l’éclosion d’une cigale, on est en droit de se poser la question du rapport entre elle et sa lourde larve souterraine. J’ai assisté à une telle éclosion. Il faut vraiment l’avoir vu : c’est étonnant. Effectivement c’est le même insecte. Mais il faut avouer qu’on ne le dirait pas…
Ce sont les libellules qui illustrent la réponse qu’obtient Thomas…

Les libellules déposent leurs œufs dans l'eau, sur la tige des plantes aquatiques ; d'autres, notamment des ‘demoiselles’, incisent la tige des plantes à la surface de l'eau ou sous l'eau et y déposent des œufs de forme allongée. Dans toutes les espèces, les œufs donnent des larves aquatiques, qui peuvent subir une quinzaine de mues avant la métamorphose, donnant la forme adulte, ailée. Parce que les larves ressemblent beaucoup aux adultes (mis à part les ailes et le mode de vie), la métamorphose est dite incomplète. Chez les libellules, le stade larvaire dure de un à trois ans.


Comme pour les disciples le temps auprès de Jésus… Puis il est cloué. Et Thomas touche les plaies du Ressuscité. Plaies dans les mains et le côté – avant et après résurrection ; métamorphose dite incomplète… Bref, c’est bien le même, en d’autres termes.



* * *



Cela s’est passé « huit jours plus tard » que le premier dimanche de Pâques, la première partie de notre texte nous l’a rappelé :

« Ce même jour qui était le premier de la semaine » ;
« Huit jours plus tard, les disciples étaient à nouveau réunis » : ainsi commence la deuxième partie du texte celle où apparaît Thomas.

Dimanche de culte, les deux fois : les deux premiers dimanches de culte ; et comme pour tous les autres, le Christ est présent ; une présence alors visible, provisoirement ; une présence désormais invisible. Ou : la seule visibilité est celle des sacrements : voir et toucher… C’est cela qu’enseigne l’épisode de Thomas.
"Mon Seigneur et mon Dieu", confesse-t-il alors.

"La paix soit avec vous", a dit Jésus pour la troisième fois.



R.P.,
Vence,
23 avril 2006



12:40 Écrit par rolpoup dans Dimanches & fêtes | Lien permanent | Commentaires (0)

16 avril 2006

Pâques






IL EST RESSUSCITÉ !









Colossiens 3, 1-4
1 Du moment que vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu ;
2 fondez vos pensées en haut, non sur la terre.
3 Vous êtes morts, en effet, et votre vie est cachée avec le Christ, en Dieu.
4 Quand le Christ, votre vie, paraîtra, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire.

Jean 20, 1-10
1 Le premier jour de la semaine, à l’aube, alors qu’il faisait encore sombre, Marie de Magdala se rend au tombeau et voit que la pierre a été enlevée du tombeau.
2 Elle court, rejoint Simon-Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit: "On a enlevé du tombeau le Seigneur, et nous ne savons pas où on l’a mis."

3 Alors Pierre sortit, ainsi que l’autre disciple, et ils allèrent au tombeau.
4 Ils couraient tous les deux ensemble, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau.
5 Il se penche et voit les bandelettes qui étaient posées là. Toutefois il n’entra pas.
6 Arrive, à son tour, Simon-Pierre qui le suivait; il entre dans le tombeau et considère les bandelettes posées là
7 et le linge qui avait recouvert la tête; celui-ci n’avait pas été déposé avec les bandelettes, mais il était roulé à part, dans un autre endroit.
8 C’est alors que l’autre disciple, celui qui était arrivé le premier, entra à son tour dans le tombeau; il vit et il crut.
9 En effet, ils n’avaient pas encore compris l’Ecriture selon laquelle Jésus devait se relever d’entre les morts.
10 Après quoi, les disciples s’en retournèrent chez eux.


*

 

La science nous dit : la résurrection est impossible. Elle a raison. C’est là le tragique de notre condition. Une chenille peut-elle voler ? Non évidemment. Écoutez l’histoire de la chenille :

Les femelles papillons pondent des œufs — de quelques œufs à plusieurs milliers selon les espèces. Lorsque les chenilles éclosent, elles commencent par manger la coquille de leur œuf. Ensuite, elles sont herbivores, pour la plupart, parfois spécialisées dans la consommation d'une plante bien précise. D’autres sont carnivores. Leur corps est mou, cylindrique et possède cinq paires de fausses pattes outre les trois paires de vraies pattes situées sur le thorax. Elles continuent de muer avant de passer au stade de nymphe ou chrysalide. Rien à voir, apparemment, avec le papillon.
Les chenilles subissent une métamorphose complète et leur cycle de vie comporte trois stades : l'œuf, la chenille, la chrysalide, plus un quatrième stade, le papillon
Concernant les trois premiers stades, cela pourrait ressembler à l’homme : le stade fœtal, puis notre stade, puis la tombe. Fin. Ici, manquerait donc un stade. Pour la chenille en sa tombe nymphale, les choses bougent… puisqu’il y a le quatrième stade, papillon.
Les chenilles de papillons de nuit s'enroulent alors dans un cocon de soie — comme un linceul — soie sécrétée par des glandes dites séricigènes (c’est-à-dire des glandes à soie), qui sont une sorte de glandes salivaires. Les chenilles de papillons de jour, en revanche, ne construisent pas de cocon : la chrysalide reste à l'air libre.
La majorité des espèces passe l'hiver sous forme de chrysalide. Le développement est alors stoppé ; c'est la diapause. C’est comme une mort…
Pendant le stade nymphal, le stade de chrysalide, le corps se transforme totalement.
La chenille de papillon subit de profondes transformations anatomiques, notamment la formation des ailes, des antennes, de la trompe. C'est la métamorphose, dont le résultat est un papillon sous sa forme adulte (appelé par les spécialistes « imago »). Les ailes de l'adulte se déplient et il s’envole.
Belle parabole que nous donne là la nature…


*

 

« Votre vie est cachée avec le Christ, en Dieu », écrit l’Apôtre.

Qu’est-ce qui nous constitue, que sommes-nous en réalité ? Nous confondons aisément notre être avec notre enveloppe temporelle. Demandez si nos cheveux et ongles, par exemple, sont une partie de nous-même. Quelle réponse ? Réponse spontanée et irréfutable : oui, bien sûr !

Ah ! bon ? Quand je me coupe les cheveux ou les ongles, une partie de mon être part-elle à la poubelle avec les chutes ou les rognures ? Nouvelle réponse sans ambiguïté : non évidemment !

Voilà quoiqu’il en soit une illustration remarquable du propos de l’Apôtre Paul sur le dépouillement du vieil homme, comme il dit, ou de ce corps de mort, comme il dit aussi. Voilà donc une enveloppe temporelle dont nous nous dépouillons, déjà cheveu par cheveu, rognure par rognure ; une enveloppe, qui s’use de toute façon, qui se dégrade de jour en jour ; jusqu’au moment où il faudra la quitter comme un vêtement qui a fait son temps.

Lorsqu’un ami s’est absenté après avoir coupé ses ongles, vais-je à la poubelle à sa recherche, par la recherche de ses rognures d’ongle ? Non évidemment ! Il n’est pas ici.

C’est à peu près ce que constate Marie au dimanche de Pâques : il n’est pas ici. Et pour qu’on ne s’y trompe pas, le corps, effectivement, n’est pas là. Ce corps, cette enveloppe, qu’il a dépouillée à la croix. « Recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ », confirmera l’Apôtre.

Il a dépouillé le corps temporel, provisoire, douloureux, et il s’est relevé d’entre les morts. Le tombeau est vide ; et pour que cela soit bien clair, la pierre en a été roulée pour que nous n’y restions pas.

Comme pour dire : la mission commence où demeurent les vôtres, les êtres humains, elle est où vous êtes envoyés, pas autour d’un tombeau.

Ce qui rend surprenant que l’on ait développé le culte du tombeau vide, du saint sépulcre, et des rognures d’ongles et autres reliques de Jésus.

D’autant plus surprenant — et cela nous ramènerait même au cœur de l’actualité — que cela a même initié des guerres, je pense notamment, mais pas seulement, aux Croisades, cas frappant : il s’agissait ici de garantir les pèlerinages au tombeau vide. Cela pour s’entendre dire qu’il n’est pas là ?

C’est là en effet ce que découvrent les uns après les autres les témoins de la résurrection : il n’est pas ici. Marie de Magdala, Pierre, l’autre disciple. Allez chez vous, allez au bout du monde, dans la Cité terrestre, il vous y précède.

Parce que ce qui vaut pour lui, et c’est là que son relèvement d’entre les morts est aussi un dévoilement, une révélation ; ce qui vaut pour lui, vaut, en lui, aussi pour nous. Un dévoilement par vagues successives, comme de gloire en gloire (2 Co 3:18).

« Votre vie est cachée avec Christ en Dieu ». « Vous êtes ressuscités avec le Christ. » Notre vrai être n’est pas dans nos rognures de corps, mais en haut, avec lui, à la droite de Dieu.

Ce qui ne rend pas nos corps temporels insignifiants. Ils sont la manifestation visible de ce que nous sommes de façon cachée, en haut. Et le lieu de la solidarité. Le corps — lieu de solidarité — que le Christ s’est vu tisser dans le sein de la Vierge Marie manifeste dans notre temps ce qu’il est définitivement devant Dieu, et qui nous apparaît dans sa résurrection.

Il est un autre niveau de réalité, celui qui apparaît dans la résurrection. Or nous en sommes aussi, à notre tour de façon cachée. C’est cet autre niveau qu’il nous faut rechercher, pour y fonder notre vie et notre comportement dans le provisoire.


*

« Quand le Christ, votre vie, paraîtra, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire », promet l’Apôtre.

Car la résurrection n’est point, pas plus que la métamorphose de la chrysalide, retour au passé, retour avant la mort. Vous connaissez la tradition de la souris : la souris qui vient emporter la dent de lait qu’a perdue l’enfant. Au matin, la dent n’est plus là, remplacée par la promesse d’un lendemain plus grand. Avec un cadeau, déposé à la place de la dent par la souris ; la souris qui par là, tel l’Ange du dimanche de Pâques, dit ainsi silencieusement à l’enfant : ne cherche plus ta dent, ton passé d’enfant est un peu mort cette nuit avec elle ; mais console-t-en par ce cadeau, et pars pour demain : ta vraie vie est cachée dans ton demain.

Vains les combats à la recherche du passé, comme recherche d’un tombeau vide ! Autant de poursuites de dents que la souris a définitivement emportées.

Mais que de dommages en de tels combats, que de larmes à la recherche d’un hier révolu. Que de combats semblables ne menons-nous pas, espèces de Croisades et de courses aux reliques, reliques de nos hier, jusqu’à aujourd’hui !

Et pourtant, elle nous est donnée, cette parole : « recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu ; fondez vos pensées en haut, non sur la terre. Vous êtes morts, en effet, et votre vie est cachée avec le Christ, en Dieu. Quand le Christ, votre vie, paraîtra, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire. »

Lorsque au matin de Pâques, Marie et les deux disciples ont vu leur foi s’ouvrir, il leur faut quitter le tombeau vide, après cette série d’allers-retours, de l’étonnement à la foi, où les étapes de la prise de conscience de la réalité de la résurrection se croisent de l’un à l’autre, entre Marie, Pierre et l’autre disciple. Le chemin de la sanctification se dévoile comme étant celui de la prise de conscience de la réalité de la résurrection du Christ. Ici, c’est Dieu lui-même qui donne le signe qui ouvre définitivement les cieux.

Alors désormais, « recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu ; fondez vos pensées en haut ». C’est-à-dire, contrairement à ce que laissent à penser certaines traductions : non pas : vivez en haut, comme dans les nuages de lendemains qui chantent, mais poursuivez votre route terrestre forts de ce que vous pouvez désormais fonder vos pensées en haut, dans la foi à la résurrection de Jésus.

Vous êtes morts avec Jésus et ressuscités avec lui. Ni cadavre au tombeau, ni nostalgie, dans l’imaginaire d’un passé qui ne reviendra pas.

« Votre vie est cachée avec le Christ, en Dieu. Quand le Christ, votre vie, paraîtra, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire. » C’est à ce niveau de réalité-là qu’est notre vrai être. Vivre de la source de Pâques, le Christ de la résurrection, pour marcher sur les routes du provisoire.

Que Dieu nous donne aujourd’hui de percevoir la présence du Ressuscité, et d’en concevoir le bonheur qu’ont connu les premiers témoins. Et puisqu’on ne reste pas là où le Christ vivant n’est plus, d’aller vers nos aujourd’hui où nous précède le Ressuscité. Amen.



ALLÉLUIA !
(d’après Grégoire de Naziance, Evêque et Père de l’Église de 329 à 389)

Puisque vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu. (Colossiens 3:1)

Le Christ est ressuscité d’entre les morts ;
levez-vous, vous aussi !

Le Christ qui dormait s’éveille ;
éveillez-vous, vous aussi !

Le Christ sort du tombeau ;
libérez-vous des chaînes du péché !

Par le Christ,
vous êtes devenus créature nouvelle ; renouvelez-vous !

C’est la Pâque du Seigneur ;
c’est le temps de la Résurrection
et le commencement de la vraie vie !

Attaché hier à la croix avec le Christ,
aujourd’hui, avec lui, je suis glorifié.
Mourant hier avec lui,
aujourd’hui, avec lui, je reviens à la vie.

Enseveli hier avec lui,
aujourd’hui, avec lui, je ressuscite.

Le Christ, qui est ressuscité des morts,
me renouvelle moi aussi en esprit
et me fait revêtir l’homme nouveau.


R.P.,

Antibes
Dimanche de Pâques, 16 avril 2006




12:50 Écrit par rolpoup dans Dimanches & fêtes | Lien permanent | Commentaires (1)