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08 mai 2006

Rois et prophètes





 

Les habits neufs du roi  











1 Samuel 8, 4-22a
4 Tous les anciens [du peuple] se rassemblèrent et vinrent trouver Samuel [...].
5 Ils lui dirent: "Te voilà devenu vieux et tes fils ne marchent pas sur tes traces. Maintenant donc, donne-nous un roi pour nous juger comme toutes les nations."6 Il déplut à Samuel qu’ils aient dit: "Donne-nous un roi pour nous juger." Et Samuel intercéda auprès du SEIGNEUR.
7 Le SEIGNEUR dit à Samuel: "Ecoute la voix du peuple en tout ce qu’ils te diront. Ce n’est pas toi qu’ils rejettent, c’est moi. Ils ne veulent plus que je règne sur eux.
8 Comme ils ont agi depuis le jour où je les ai fait monter d’Egypte jusqu’aujourd’hui, m’abandonnant pour servir d’autres dieux, ainsi agissent-ils aussi envers toi.
9 Maintenant donc, écoute leur voix. Mais ne manque pas de les avertir: apprends-leur comment gouvernera le roi qui régnera sur eux."
10 Samuel redit toutes les paroles du SEIGNEUR au peuple qui lui demandait un roi.
11 Il dit: "Voici comment gouvernera le roi qui régnera sur vous: il prendra vos fils pour les affecter à ses chars et à sa cavalerie, et ils courront devant son char.
12 Il les prendra pour s’en faire des chefs de millier et des chefs de cinquantaine, pour labourer son labour, pour moissonner sa moisson, pour fabriquer ses armes et ses harnais.
13 Il prendra vos filles comme parfumeuses, cuisinières et boulangères.
14 Il prendra vos champs, vos vignes et vos oliviers les meilleurs. Il les prendra et les donnera à ses serviteurs.
15 Il lèvera [l’impôt] sur vos grains et sur vos vignes et la donnera à ses eunuques et à ses serviteurs.
16 Il prendra vos serviteurs et vos servantes, les meilleurs de vos jeunes gens et vos ânes pour les mettre à son service.
17 Il lèvera [l’impôt] sur vos troupeaux. Vous-mêmes enfin, vous deviendrez ses esclaves.
18 Ce jour-là, vous crierez à cause de ce roi que vous vous serez choisi, mais, ce jour-là, le SEIGNEUR ne vous répondra point."
19 Mais le peuple refusa d’écouter la voix de Samuel. "Non, dirent-ils. C’est un roi que nous aurons.
20 Et nous serons, nous aussi, comme toutes les nations. Notre roi nous jugera, il sortira à notre tête et combattra nos combats."
21 Samuel écouta toutes les paroles du peuple et les répéta aux oreilles du SEIGNEUR.
22 Le SEIGNEUR dit alors à Samuel: "Ecoute leur voix et donne-leur un roi."


*


Il y a de longues années, vivait un roi qui aimait plus que tout les habits neufs, qui dépensait tout son argent pour être bien habillé. Il ne se souciait pas de ses soldats, ni du théâtre, ni de ses promenades dans les bois, si ce n'était pour faire montre de ses vêtements neufs. Il avait un costume pour chaque heure de chaque jour de la semaine et tandis qu'on dit habituellement d'un roi qu'il est au conseil, on disait toujours de lui: "Le roi est dans sa garde-robe!"
Dans la grande ville où il habitait, la vie était gaie et chaque jour beaucoup d'étrangers arrivaient. Un jour, arrivèrent deux escrocs qui affirmèrent être tisserands et être capables de pouvoir tisser la plus belle étoffe que l'on pût imaginer. Non seulement les couleurs et le motif seraient exceptionnellement beaux, mais les vêtements qui en seraient confectionnés posséderaient l'étonnante propriété d'être invisibles aux yeux de ceux qui ne convenaient pas à leurs fonctions ou qui étaient simplement idiots.
"Ce serait des vêtements précieux", se dit le roi. "Si j'en avais de pareils, je pourrais découvrir qui, de mes sujets, ne sied pas à ses fonctions et départager les intelligents des imbéciles ! Je dois sur-le-champ me faire tisser cette étoffe!" Il donna aux deux escrocs une avance sur leur travail et ceux-ci se mirent à l'ouvrage.
Ils installèrent deux métiers à tisser, mais ils firent semblant de travailler car il n'y avait absolument aucun fil sur le métier. Ils demandèrent la soie la plus fine et l'or le plus précieux qu'ils prirent pour eux et restèrent sur leurs métiers vides jusqu'à bien tard dans la nuit.
"Je voudrais bien savoir où ils en sont avec l'étoffe!", se dit le roi. Mais il se sentait mal à l'aise à l'idée qu'elle soit invisible aux yeux de ceux qui sont sots ou mal dans leur fonction. Il se dit qu'il n'avait rien à craindre pour lui-même, mais préféra dépêcher quelqu'un d'autre pour voir comment cela se passait. Chacun dans la ville connaissait les qualités exceptionnelles de l'étoffe et tous étaient avides de savoir combien leur voisin était inapte ou idiot.
"Je vais envoyer mon vieux et honnête ministre auprès des tisserands", se dit le roi. "Il est le mieux à même de juger de l'allure de l'étoffe; il est d'une grande intelligence et personne ne fait mieux son travail que lui!"
Le vieux et bon ministre alla donc dans l'atelier où les deux escrocs étaient assis, travaillant sur leurs métiers vides. "Que Dieu nous garde!", pensa le ministre en écarquillant les yeux. "Je ne vois rien du tout!" Mais il se garda bien de le dire.
Les deux escrocs l'invitèrent à s'approcher et lui demandèrent si ce n'étaient pas là en effet un joli motif et de magnifiques couleurs. Puis, ils lui montrèrent un métier vide. Le pauvre vieux ministre écarquilla encore plus les yeux, mais il ne vit toujours rien, puisqu'il n'y avait rien. "Mon Dieu, pensa-t-il, serais-je sot? Je ne l'aurais jamais cru et personne ne devrait le savoir! Serais-je inapte à mon travail? Non, il ne faut pas que je raconte que je ne peux pas voir l'étoffe."
"Eh bien, qu'en dites-vous ?", demanda l'un des tisserands.
"Oh, c'est ravissant, tout ce qu'il y a de plus joli !", répondit le vieux ministre, en regardant au travers de ses lunettes. "Ce motif et ces couleurs! Je ne manquerai pas de dire au roi que tout cela me plaît beaucoup!"
"Nous nous en réjouissons!", dirent les deux tisserands. Puis, ils nommèrent les couleurs et discutèrent du motif. Le vieux ministre écouta attentivement afin de pouvoir lui-même en parler lorsqu'il serait de retour auprès du roi; et c'est ce qu'il fit.
Les deux escrocs exigèrent encore plus d'argent, plus de soie et plus d'or pour leur tissage. Ils mettaient tout dans leurs poches et rien sur les métiers; mais ils continuèrent, comme ils l'avaient fait jusqu'ici, à faire semblant de travailler.
Le roi envoya bientôt un autre honnête fonctionnaire pour voir où en était le travail et quand l'étoffe serait bientôt prête. Il arriva à cet homme ce qui était arrivé au ministre: il regarda et regarda encore, mais comme il n'y avait rien sur le métier, il ne put rien y voir.
"N'est-ce pas là un magnifique morceau d'étoffe?", lui demandèrent les deux escrocs en lui montrant et lui expliquant les splendides motifs qui n'existaient tout simplement pas.
"Je ne suis pas sot, se dit le fonctionnaire; ce serait donc que je ne conviens pas à mes fonctions? Ce serait plutôt étrange, mais je ne dois pas le laisser paraître!" Et il fit l'éloge de l'étoffe, qu'il n'avait pas vue, puis il exprima la joie que lui procuraient les couleurs et le merveilleux motif. "Oui, c'est tout à fait merveilleux!", dit-il au roi.
Dans la ville, tout le monde parlait de la magnifique étoffe, et le roi voulu la voir de ses propres yeux tandis qu'elle se trouvait encore sur le métier. Accompagné de toute une foule de dignitaires, dont le ministre et le fonctionnaire, il alla chez les deux escrocs, lesquels s'affairaient à tisser sans le moindre fil.
"N'est-ce pas magnifique?", dirent les deux fonctionnaires qui étaient déjà venus. "Que Votre Majesté admire les motifs et les couleurs!" Puis, ils montrèrent du doigt un métier vide, s'imaginant que les autres pouvaient y voir quelque chose.
"Comment!, pensa le roi, mais je ne vois rien! C'est affreux! Serais-je sot? Ne serais-je pas fait pour être roi? Ce serait bien la chose la plus terrible qui puisse jamais m'arriver."
"Magnifique, ravissant, parfait, dit-il finalement, je donne ma plus haute approbation!" Il hocha la tête, en signe de satisfaction, et contempla le métier vide; mais il se garda bien de dire qu'il ne voyait rien. Tous les membres de la suite qui l'avait accompagné regardèrent et regardèrent encore; mais comme pour tous les autres, rien ne leur apparût et tous dirent comme le roi: "C'est véritablement très beau !" Puis ils conseillèrent au roi de porter ces magnifiques vêtements pour la première fois à l'occasion d'une grande fête qui devrait avoir lieu très bientôt.
Merveilleux était le mot que l'on entendait sur toutes les lèvres, et tous semblaient se réjouir. Le roi décora chacun des escrocs d'une croix de chevalier qu'ils mirent à leur boutonnière et il leur donna le titre de gentilshommes tisserands.
La nuit qui précéda le matin de la fête, les escrocs restèrent à travailler avec seize chandelles. Tous les gens pouvaient se rendre compte du mal qu'ils se donnaient pour terminer les habits du roi. Les tisserands firent semblant d'enlever l'étoffe de sur le métier, coupèrent dans l'air avec de gros ciseaux, cousirent avec des aiguilles sans fils et dirent finalement: "Voyez, les habits neufs du roi sont à présent terminés !"
"Voyez, Majesté, voici le pantalon, voilà la veste, voilà le manteau!" et ainsi de suite. "C'est aussi léger qu'une toile d'araignée; on croirait presque qu'on n'a rien sur le corps, mais c'est là toute la beauté de la chose!"
"Oui, oui !", dirent tous les courtisans, mais ils ne pouvaient rien voir, puisqu'il n'y avait rien.
"Votre Majesté Impériale veut-elle avoir l'insigne bonté d'ôter ses vêtements afin que nous puissions lui mettre les nouveaux, là, devant le grand miroir !"
Le roi enleva tous ses beaux vêtements et les escrocs firent comme s'ils lui enfilaient chacune des pièces du nouvel habit qui, apparemment, venait tout juste d'être cousu. Le roi se tourna et se retourna devant le miroir.
"Dieu ! comme cela vous va bien. Quels dessins, quelles couleurs", s'exclamait tout le monde.
"Ceux qui doivent porter le dais au-dessus de Votre Majesté ouvrant la procession sont arrivés", dit le maître des cérémonies.
"Je suis prêt", dit le roi. "Est-ce que cela ne me va pas bien ? Et il en se tourna encore une fois devant le miroir, car il devait faire semblant de bien contempler son costume.
Les chambellans qui devaient porter la traîne du manteau de cour tâtonnaient de leurs mains le parquet, faisant semblant d'attraper et de soulever la traîne. Ils allèrent et firent comme s'ils tenaient quelque chose dans les airs; ils ne voulaient pas risquer que l'on remarquât qu'ils ne pouvaient rien voir.
C'est ainsi que le roi marchait devant la procession sous le magnifique dais, et tous ceux qui se trouvaient dans la rue ou aux fenêtre disaient: "Les habits neufs du roi sont admirables ! Quel manteau avec traîne de toute beauté, comme elle s'étale avec splendeur !" Personne ne voulait laisser paraître qu'il ne voyait rien, puisque cela aurait montré qu'il était incapable dans sa fonction ou simplement un sot. Aucun habit neuf du roi n'avait connu un tel succès.
"Mais il n'a pas d'habit du tout !", cria petit enfant dans la foule.
"Entendez la voix de l'innocence!", dit le père; et chacun murmura à son voisin ce que l'enfant avait dit.

Puis la foule entière se mit à crier: "Mais il n'a pas d'habit du tout!" Le roi frissonna, car il lui semblait bien que le peuple avait raison, mais il se dit: "Maintenant, je dois tenir bon jusqu'à la fin de la procession." Et le cortège poursuivit sa route et les chambellans continuèrent de porter la traîne, qui n'existait pas.


Conte de Hans Christian ANDERSEN
intitulé Les habits neufs de l'empereur, 1837


*


Jean 18, 36-37
36 Jésus répondit [à Pilate devant qui il comparaissait] : "Ma royauté n’est pas de ce monde. Si ma royauté était de ce monde, les miens auraient combattu pour que je ne sois pas livré [pour être condamné]. Mais ma royauté, maintenant, n’est pas d’ici."
37 Pilate lui dit alors: "Tu es donc roi?" Jésus lui répondit: "C’est toi qui dis que je suis roi. Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix."


R.P.
KT Antibes
6 mai 2006



15:10 Écrit par rolpoup dans Pause caté | Lien permanent | Commentaires (0)

23 avril 2006

Comme pour l’envol d’un papillon…






JÉSUS SOUFFLA SUR EUX








Jean 20, 19-31
19 Le soir de ce même jour qui était le premier de la semaine, alors que, par crainte des Judéens, les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées, Jésus vint, il se tint au milieu d’eux et il leur dit : "La paix soit avec vous."
20 Tout en parlant, il leur montra ses mains et son côté. En voyant le Seigneur, les disciples furent tout à la joie.
21 Alors, à nouveau, Jésus leur dit : "La paix soit avec vous. Comme le Père m’a envoyé, à mon tour je vous envoie."
22 Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et leur dit : "Recevez l’Esprit Saint ;
23 ceux pour qui vous remettez les péchés, ils leur ont été remis. Ceux pour qui vous les soumettez, ils leur ont été soumis."
24 Cependant Thomas, l’un des Douze, celui qu’on appelle Didyme, n’était pas avec eux lorsque Jésus vint.
25 Les autres disciples lui dirent donc : "Nous avons vu le Seigneur !" Mais il leur répondit : "Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je n’enfonce pas mon doigt à la place des clous et si je n’enfonce pas ma main dans son côté, je ne croirai pas !"
26 Or huit jours plus tard, les disciples étaient à nouveau réunis dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vint, toutes portes verrouillées, il se tint au milieu d’eux et leur dit :
"La paix soit avec vous."
27 Ensuite il dit à Thomas : "Avance ton doigt ici et regarde mes mains; avance ta main et enfonce-la dans mon côté, cesse d’être incrédule et deviens un homme de foi."
28 Thomas lui répondit : "Mon Seigneur et mon Dieu."
29 Jésus lui dit : "Parce que tu m’as vu, tu as cru; bienheureux ceux qui, sans avoir vu, ont cru."
30 Jésus a opéré sous les yeux de ses disciples bien d’autres signes qui ne sont pas rapportés dans ce livre.
31 Ceux-ci l’ont été pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour que, en croyant, vous ayez la vie en son nom.



*

Les paraboles animalières me semblent particulièrement parlantes pour illustrer la résurrection. En l’occurrence les métamorphoses d’insectes. Ceux qui lisent ce blog ou qui étaient à Antibes la semaine dernière m’ont entendu parler de chenilles et de papillons, à propos de ce que la résurrection nous semble tellement impossible. Impossible ! Les disciples, et Thomas, en sont naturellement là. Une chenille peut-elle voler ? Non évidemment. Pas comme chenille. Mais… comme papillon…


*


Pour ne pas reprendre l’histoire de la chenille, je passerai à d’autres insectes, pour illustrer aujourd’hui deux choses : à la fois le thème de la résurrection et celui, de cette semaine, de la peur, de la crainte des disciples.


Quelques comparaisons entomologiques — « insectiformes » — : prenons la cigale : la cigale femelle - après l'accouplement, à l'aide de son ovipositeur, situé à l'extrémité de l'abdomen, incise l'écorce des arbres pour y pondre ses œufs. Une femelle peut pondre jusqu'à six cents œufs. Les jeunes sans ailes, appelés nymphes, éclosent après six semaines environ et tombent sur le sol où ils s'enfoncent de quelques centimètres. Se nourrissant de la sève des racines, ils se développent lentement. Il leur faut parfois plusieurs années pour arriver à maturité. Quand ils émergent enfin, ils grimpent sur le tronc, s'y fixent et muent. Les adultes émergent de leur enveloppe nymphale, sèchent en quelques heures, s’envolent, s'accouplent et se nourrissent de plantes jusqu'à ce qu'ils meurent environ un mois plus tard.


Environ un mois avant de disparaître. Comme, pour les disciples, pour en revenir à eux, le temps des apparitions du Christ, de Pâques à l’Ascension…

*

En attendant :
« Par crainte des Judéens, les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées, »
Puis ils vont passer de la crainte (des Judéens, de la part de ces Galiléens : pas des juifs ! - on n'est pas dans une querelle religieuse !) à la libération : « Jésus vint, il se tint au milieu d’eux et il leur dit : "La paix soit avec vous." »

Revenons à nos insectes :

Certains papillons, en présentant de fortes ressemblances avec d'autres espèces (mimétisme dit batésien), bénéficient d'une protection passive contre les prédateurs. Chez de nombreux papillons, la coloration des ailes joue un rôle dans la protection contre les prédateurs. Certaines espèces sont difficilement détectables dans leur environnement forestier grâce aux motifs complexes qui ornent leurs ailes.


Ils se cachent. Comme les disciples, qui vont ensuite passer de la crainte à la libération ; c’est-à-dire : à la Mission : « Jésus leur dit : "La paix soit avec vous. Comme le Père m’a envoyé, à mon tour je vous envoie." » - Recevez l’Esprit Saint : et déliez ceux qui sont liés – cf. Mt 16, 19.
Jésus souffla sur eux comme pour l’envol d’une cigale ou d’un papillon sortant de sa chrysalide. Souffle de l’Esprit…

« Recevez l’Esprit Saint ». Cet Esprit qui vient du Père seul, le Père l’envoie par Jésus à qui il a été remis. Ici s’ouvre la porte de la liberté à laquelle nous sommes invités à notre tour.

Et cette liberté est une question de pardon. D’où la réserve qu’il faut avoir quant à la traduction qui veut que Jésus dise aux Apôtres : « ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. » Comme si les Apôtres avaient pour mission de retenir captifs de leurs péchés certains de ceux à qui ils sont envoyés !

Les Apôtres sont envoyés pour communiquer la libération que Jésus vient de leur octroyer dans le don de l’Esprit saint. De la communiquer abondamment. Pas de la mégoter.

Il se trouve qu’une toute autre traduction de cette parole est possible, que je crois devoir proposer : « ceux pour qui vous remettez les péchés, ils leur ont été remis. Ceux pour qui vous les soumettez, ils leur ont été soumis ».

Voilà donc qui donne tout autre chose : remettre les péchés et les soumettre. Deux faces de la libération. Remettre les péchés, c’est pardonner, soumettre les péchés, c’est permettre de les dominer. Être libéré du fruit du péché.

*

Thomas, lui, n’était pas là. Ils disent avoir vu. Mais y a-t-il un rapport entre ce qu’ils ont vu et le Crucifié ? Après tout : c’est cela que Thomas veut savoir.

Si l’on n’assiste pas à l’éclosion d’une cigale, on est en droit de se poser la question du rapport entre elle et sa lourde larve souterraine. J’ai assisté à une telle éclosion. Il faut vraiment l’avoir vu : c’est étonnant. Effectivement c’est le même insecte. Mais il faut avouer qu’on ne le dirait pas…
Ce sont les libellules qui illustrent la réponse qu’obtient Thomas…

Les libellules déposent leurs œufs dans l'eau, sur la tige des plantes aquatiques ; d'autres, notamment des ‘demoiselles’, incisent la tige des plantes à la surface de l'eau ou sous l'eau et y déposent des œufs de forme allongée. Dans toutes les espèces, les œufs donnent des larves aquatiques, qui peuvent subir une quinzaine de mues avant la métamorphose, donnant la forme adulte, ailée. Parce que les larves ressemblent beaucoup aux adultes (mis à part les ailes et le mode de vie), la métamorphose est dite incomplète. Chez les libellules, le stade larvaire dure de un à trois ans.


Comme pour les disciples le temps auprès de Jésus… Puis il est cloué. Et Thomas touche les plaies du Ressuscité. Plaies dans les mains et le côté – avant et après résurrection ; métamorphose dite incomplète… Bref, c’est bien le même, en d’autres termes.



* * *



Cela s’est passé « huit jours plus tard » que le premier dimanche de Pâques, la première partie de notre texte nous l’a rappelé :

« Ce même jour qui était le premier de la semaine » ;
« Huit jours plus tard, les disciples étaient à nouveau réunis » : ainsi commence la deuxième partie du texte celle où apparaît Thomas.

Dimanche de culte, les deux fois : les deux premiers dimanches de culte ; et comme pour tous les autres, le Christ est présent ; une présence alors visible, provisoirement ; une présence désormais invisible. Ou : la seule visibilité est celle des sacrements : voir et toucher… C’est cela qu’enseigne l’épisode de Thomas.
"Mon Seigneur et mon Dieu", confesse-t-il alors.

"La paix soit avec vous", a dit Jésus pour la troisième fois.



R.P.,
Vence,
23 avril 2006



12:40 Écrit par rolpoup dans Dimanches & fêtes | Lien permanent | Commentaires (0)

16 avril 2006

Pâques






IL EST RESSUSCITÉ !









Colossiens 3, 1-4
1 Du moment que vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu ;
2 fondez vos pensées en haut, non sur la terre.
3 Vous êtes morts, en effet, et votre vie est cachée avec le Christ, en Dieu.
4 Quand le Christ, votre vie, paraîtra, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire.

Jean 20, 1-10
1 Le premier jour de la semaine, à l’aube, alors qu’il faisait encore sombre, Marie de Magdala se rend au tombeau et voit que la pierre a été enlevée du tombeau.
2 Elle court, rejoint Simon-Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit: "On a enlevé du tombeau le Seigneur, et nous ne savons pas où on l’a mis."

3 Alors Pierre sortit, ainsi que l’autre disciple, et ils allèrent au tombeau.
4 Ils couraient tous les deux ensemble, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau.
5 Il se penche et voit les bandelettes qui étaient posées là. Toutefois il n’entra pas.
6 Arrive, à son tour, Simon-Pierre qui le suivait; il entre dans le tombeau et considère les bandelettes posées là
7 et le linge qui avait recouvert la tête; celui-ci n’avait pas été déposé avec les bandelettes, mais il était roulé à part, dans un autre endroit.
8 C’est alors que l’autre disciple, celui qui était arrivé le premier, entra à son tour dans le tombeau; il vit et il crut.
9 En effet, ils n’avaient pas encore compris l’Ecriture selon laquelle Jésus devait se relever d’entre les morts.
10 Après quoi, les disciples s’en retournèrent chez eux.


*

 

La science nous dit : la résurrection est impossible. Elle a raison. C’est là le tragique de notre condition. Une chenille peut-elle voler ? Non évidemment. Écoutez l’histoire de la chenille :

Les femelles papillons pondent des œufs — de quelques œufs à plusieurs milliers selon les espèces. Lorsque les chenilles éclosent, elles commencent par manger la coquille de leur œuf. Ensuite, elles sont herbivores, pour la plupart, parfois spécialisées dans la consommation d'une plante bien précise. D’autres sont carnivores. Leur corps est mou, cylindrique et possède cinq paires de fausses pattes outre les trois paires de vraies pattes situées sur le thorax. Elles continuent de muer avant de passer au stade de nymphe ou chrysalide. Rien à voir, apparemment, avec le papillon.
Les chenilles subissent une métamorphose complète et leur cycle de vie comporte trois stades : l'œuf, la chenille, la chrysalide, plus un quatrième stade, le papillon
Concernant les trois premiers stades, cela pourrait ressembler à l’homme : le stade fœtal, puis notre stade, puis la tombe. Fin. Ici, manquerait donc un stade. Pour la chenille en sa tombe nymphale, les choses bougent… puisqu’il y a le quatrième stade, papillon.
Les chenilles de papillons de nuit s'enroulent alors dans un cocon de soie — comme un linceul — soie sécrétée par des glandes dites séricigènes (c’est-à-dire des glandes à soie), qui sont une sorte de glandes salivaires. Les chenilles de papillons de jour, en revanche, ne construisent pas de cocon : la chrysalide reste à l'air libre.
La majorité des espèces passe l'hiver sous forme de chrysalide. Le développement est alors stoppé ; c'est la diapause. C’est comme une mort…
Pendant le stade nymphal, le stade de chrysalide, le corps se transforme totalement.
La chenille de papillon subit de profondes transformations anatomiques, notamment la formation des ailes, des antennes, de la trompe. C'est la métamorphose, dont le résultat est un papillon sous sa forme adulte (appelé par les spécialistes « imago »). Les ailes de l'adulte se déplient et il s’envole.
Belle parabole que nous donne là la nature…


*

 

« Votre vie est cachée avec le Christ, en Dieu », écrit l’Apôtre.

Qu’est-ce qui nous constitue, que sommes-nous en réalité ? Nous confondons aisément notre être avec notre enveloppe temporelle. Demandez si nos cheveux et ongles, par exemple, sont une partie de nous-même. Quelle réponse ? Réponse spontanée et irréfutable : oui, bien sûr !

Ah ! bon ? Quand je me coupe les cheveux ou les ongles, une partie de mon être part-elle à la poubelle avec les chutes ou les rognures ? Nouvelle réponse sans ambiguïté : non évidemment !

Voilà quoiqu’il en soit une illustration remarquable du propos de l’Apôtre Paul sur le dépouillement du vieil homme, comme il dit, ou de ce corps de mort, comme il dit aussi. Voilà donc une enveloppe temporelle dont nous nous dépouillons, déjà cheveu par cheveu, rognure par rognure ; une enveloppe, qui s’use de toute façon, qui se dégrade de jour en jour ; jusqu’au moment où il faudra la quitter comme un vêtement qui a fait son temps.

Lorsqu’un ami s’est absenté après avoir coupé ses ongles, vais-je à la poubelle à sa recherche, par la recherche de ses rognures d’ongle ? Non évidemment ! Il n’est pas ici.

C’est à peu près ce que constate Marie au dimanche de Pâques : il n’est pas ici. Et pour qu’on ne s’y trompe pas, le corps, effectivement, n’est pas là. Ce corps, cette enveloppe, qu’il a dépouillée à la croix. « Recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ », confirmera l’Apôtre.

Il a dépouillé le corps temporel, provisoire, douloureux, et il s’est relevé d’entre les morts. Le tombeau est vide ; et pour que cela soit bien clair, la pierre en a été roulée pour que nous n’y restions pas.

Comme pour dire : la mission commence où demeurent les vôtres, les êtres humains, elle est où vous êtes envoyés, pas autour d’un tombeau.

Ce qui rend surprenant que l’on ait développé le culte du tombeau vide, du saint sépulcre, et des rognures d’ongles et autres reliques de Jésus.

D’autant plus surprenant — et cela nous ramènerait même au cœur de l’actualité — que cela a même initié des guerres, je pense notamment, mais pas seulement, aux Croisades, cas frappant : il s’agissait ici de garantir les pèlerinages au tombeau vide. Cela pour s’entendre dire qu’il n’est pas là ?

C’est là en effet ce que découvrent les uns après les autres les témoins de la résurrection : il n’est pas ici. Marie de Magdala, Pierre, l’autre disciple. Allez chez vous, allez au bout du monde, dans la Cité terrestre, il vous y précède.

Parce que ce qui vaut pour lui, et c’est là que son relèvement d’entre les morts est aussi un dévoilement, une révélation ; ce qui vaut pour lui, vaut, en lui, aussi pour nous. Un dévoilement par vagues successives, comme de gloire en gloire (2 Co 3:18).

« Votre vie est cachée avec Christ en Dieu ». « Vous êtes ressuscités avec le Christ. » Notre vrai être n’est pas dans nos rognures de corps, mais en haut, avec lui, à la droite de Dieu.

Ce qui ne rend pas nos corps temporels insignifiants. Ils sont la manifestation visible de ce que nous sommes de façon cachée, en haut. Et le lieu de la solidarité. Le corps — lieu de solidarité — que le Christ s’est vu tisser dans le sein de la Vierge Marie manifeste dans notre temps ce qu’il est définitivement devant Dieu, et qui nous apparaît dans sa résurrection.

Il est un autre niveau de réalité, celui qui apparaît dans la résurrection. Or nous en sommes aussi, à notre tour de façon cachée. C’est cet autre niveau qu’il nous faut rechercher, pour y fonder notre vie et notre comportement dans le provisoire.


*

« Quand le Christ, votre vie, paraîtra, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire », promet l’Apôtre.

Car la résurrection n’est point, pas plus que la métamorphose de la chrysalide, retour au passé, retour avant la mort. Vous connaissez la tradition de la souris : la souris qui vient emporter la dent de lait qu’a perdue l’enfant. Au matin, la dent n’est plus là, remplacée par la promesse d’un lendemain plus grand. Avec un cadeau, déposé à la place de la dent par la souris ; la souris qui par là, tel l’Ange du dimanche de Pâques, dit ainsi silencieusement à l’enfant : ne cherche plus ta dent, ton passé d’enfant est un peu mort cette nuit avec elle ; mais console-t-en par ce cadeau, et pars pour demain : ta vraie vie est cachée dans ton demain.

Vains les combats à la recherche du passé, comme recherche d’un tombeau vide ! Autant de poursuites de dents que la souris a définitivement emportées.

Mais que de dommages en de tels combats, que de larmes à la recherche d’un hier révolu. Que de combats semblables ne menons-nous pas, espèces de Croisades et de courses aux reliques, reliques de nos hier, jusqu’à aujourd’hui !

Et pourtant, elle nous est donnée, cette parole : « recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu ; fondez vos pensées en haut, non sur la terre. Vous êtes morts, en effet, et votre vie est cachée avec le Christ, en Dieu. Quand le Christ, votre vie, paraîtra, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire. »

Lorsque au matin de Pâques, Marie et les deux disciples ont vu leur foi s’ouvrir, il leur faut quitter le tombeau vide, après cette série d’allers-retours, de l’étonnement à la foi, où les étapes de la prise de conscience de la réalité de la résurrection se croisent de l’un à l’autre, entre Marie, Pierre et l’autre disciple. Le chemin de la sanctification se dévoile comme étant celui de la prise de conscience de la réalité de la résurrection du Christ. Ici, c’est Dieu lui-même qui donne le signe qui ouvre définitivement les cieux.

Alors désormais, « recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu ; fondez vos pensées en haut ». C’est-à-dire, contrairement à ce que laissent à penser certaines traductions : non pas : vivez en haut, comme dans les nuages de lendemains qui chantent, mais poursuivez votre route terrestre forts de ce que vous pouvez désormais fonder vos pensées en haut, dans la foi à la résurrection de Jésus.

Vous êtes morts avec Jésus et ressuscités avec lui. Ni cadavre au tombeau, ni nostalgie, dans l’imaginaire d’un passé qui ne reviendra pas.

« Votre vie est cachée avec le Christ, en Dieu. Quand le Christ, votre vie, paraîtra, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire. » C’est à ce niveau de réalité-là qu’est notre vrai être. Vivre de la source de Pâques, le Christ de la résurrection, pour marcher sur les routes du provisoire.

Que Dieu nous donne aujourd’hui de percevoir la présence du Ressuscité, et d’en concevoir le bonheur qu’ont connu les premiers témoins. Et puisqu’on ne reste pas là où le Christ vivant n’est plus, d’aller vers nos aujourd’hui où nous précède le Ressuscité. Amen.



ALLÉLUIA !
(d’après Grégoire de Naziance, Evêque et Père de l’Église de 329 à 389)

Puisque vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu. (Colossiens 3:1)

Le Christ est ressuscité d’entre les morts ;
levez-vous, vous aussi !

Le Christ qui dormait s’éveille ;
éveillez-vous, vous aussi !

Le Christ sort du tombeau ;
libérez-vous des chaînes du péché !

Par le Christ,
vous êtes devenus créature nouvelle ; renouvelez-vous !

C’est la Pâque du Seigneur ;
c’est le temps de la Résurrection
et le commencement de la vraie vie !

Attaché hier à la croix avec le Christ,
aujourd’hui, avec lui, je suis glorifié.
Mourant hier avec lui,
aujourd’hui, avec lui, je reviens à la vie.

Enseveli hier avec lui,
aujourd’hui, avec lui, je ressuscite.

Le Christ, qui est ressuscité des morts,
me renouvelle moi aussi en esprit
et me fait revêtir l’homme nouveau.


R.P.,

Antibes
Dimanche de Pâques, 16 avril 2006




12:50 Écrit par rolpoup dans Dimanches & fêtes | Lien permanent | Commentaires (1)