Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

« Entre Roch Hashanah et Yom Kippour | Page d'accueil | Lumière... »

09 octobre 2006

Alliance

 




Signe d’Alliance
 











Genèse 2, 18-24

18  Le SEIGNEUR Dieu dit: "Il n’est pas bon pour l’homme d’être seul. Je veux lui faire un soutien qui lui soit accordé."
[…]
21  Le SEIGNEUR Dieu fit tomber dans une torpeur l’homme qui s’endormit; il prit l’un de ses côtés et referma les chairs à sa place.

22  Le SEIGNEUR Dieu transforma le côté qu’il avait pris à l’homme en une femme qu’il lui amena.
23  L’homme s’écria: "Voici cette fois l’os de mes os et la chair de ma chair, celle-ci, on l’appellera femme car c’est de l’homme qu’elle a été prise."
24  Aussi l’homme laisse-t-il son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, et ils deviennent une seule chair.


Hébreux 2, 9-18
9  Nous faisons une constatation: celui qui a été abaissé quelque peu par rapport aux anges, Jésus, se trouve, à cause de la mort qu’il a soufferte, couronné de gloire et d’honneur. Ainsi, par la grâce de Dieu, c’est pour tout homme qu’il a goûté la mort.
10  Il convenait, en effet, à celui pour qui et par qui tout existe et qui voulait conduire à la gloire une multitude de fils, de mener à l’accomplissement par des souffrances l’initiateur de leur salut.
11  Car le sanctificateur et les sanctifiés ont tous une même origine; aussi ne rougit-il pas de les appeler frères
12  et de dire: J’annoncerai ton nom à mes frères, au milieu de l’assemblée, je te louerai,
13  et encore: Moi, je serai plein de confiance en lui, et encore: Me voici, moi et les enfants que Dieu m’a donnés.
14  Ainsi donc, puisque les enfants ont en commun le sang et la chair, lui aussi, pareillement, partagea la même condition, afin de réduire à l’impuissance, par sa mort, celui qui détenait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable,
15  et de délivrer ceux qui, par crainte de la mort, passaient toute leur vie dans une situation d’esclaves.
16  Car ce n’est pas à des anges qu’il vient en aide, mais c’est à la descendance d’Abraham.
17  Aussi devait-il en tous points se faire semblable à ses frères, afin de devenir un grand prêtre miséricordieux en même temps qu’accrédité auprès de Dieu pour effacer les péchés du peuple.
18  Car puisqu’il a souffert lui-même l’épreuve, il est en mesure de porter secours à ceux qui sont éprouvés.


Marc 10, 2-16
2  Des Pharisiens s’avancèrent et, pour lui tendre un piège, ils lui demandaient s’il est permis à un homme de répudier sa femme.
3  Il leur répondit: "Qu’est-ce que Moïse vous a prescrit?"
4  Ils dirent: "Moïse a permis d’écrire un certificat de répudiation et de renvoyer sa femme."
5  Jésus leur dit: "C’est à cause de la dureté de votre cœur qu’il a écrit pour vous ce commandement.
6  Mais au commencement du monde, Dieu les fit mâle et femelle;
7  c’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme,
8  et les deux ne feront qu’une seule chair. Ainsi, ils ne sont plus deux, mais une seule chair.
9  Que l’homme donc ne sépare pas ce que Dieu a uni."
10  A la maison, les disciples l’interrogeaient de nouveau sur ce sujet.
11  Il leur dit: "Si quelqu’un répudie sa femme et en épouse une autre, il est adultère à l’égard de la première;
12  et si la femme répudie son mari et en épouse un autre, elle est adultère."
13  Des gens lui amenaient des enfants pour qu’il les touche, mais les disciples les rabrouèrent.
14  En voyant cela, Jésus s’indigna et leur dit: "Laissez les enfants venir à moi, ne les empêchez pas, car le Royaume de Dieu est à ceux qui sont comme eux.
15  En vérité, je vous le déclare, qui n’accueille pas le Royaume de Dieu comme un enfant n’y entrera pas."
16  Et il les embrassait et les bénissait en leur imposant les mains.


*


Le Christ partageant la chair des hommes (Héb) ; l’homme et la femme qui sont une même chair séparée et qui deviennent une seule chair (Gn et Mc) ; c’est le mot « chair » qui relie les textes que nous avons lus. Où il est question d’Alliance, au plus fort entre Dieu et les hommes, signifiée par une alliance entre l’homme et celle qu’il reconnaît comme chair de sa chair.

Alliance. Thème qui est au cœur de l’histoire biblique, qui nous présente l'amour de Dieu pour son peuple comme similaire à celui d'un homme et d'une femme. Du coup, un amour humain, qui fonde une Alliance — le mariage —, est appelé à dire en signe ce qu'est cette autre Alliance, l’Alliance que Dieu a scellée avec nous.

Cela nous fait accéder à une réalité spirituelle vaste, difficilement accessible à l'intelligence seule. L’image du couple : il s’agit — à travers une réalité toute quotidienne : l'amour dans ses aspects les plus concrets, — d’ouvrir à nos sens l’accès à des vérités d'une portée éternelle.

Nous sommes des êtres de chair, nos intelligences sont rivées à la matière par leurs instruments en cette vie, les instruments de nos cinq sens, par lesquels nous recevons les messages les plus spirituels — voire même le message de la parole de Dieu.

Êtres de sens, « comment entendront-ils si personne ne prêche ? » écrit l’Apôtre Paul de ses auditeurs. Le message éternel est communiqué aux oreilles de chair du croyant par l'Apôtre qui prêche. Et pour nous qui n'entendons plus les paroles de l'Apôtre, ce sont nos yeux, qui le lisent dans la Bible, qui font office de médiateurs de la Parole divine. Parole divine qui sera confirmée encore à nos sens par d’autres prédications, et au moyen des sacrements, l’eau du baptême, le pain et le vin, par l'intermédiaire de ces trois autres sens que sont le toucher, le goût et l'odorat, mais aussi encore la vue et l'ouïe.

Voilà donc un message qui est au-delà de nos sens, concernant un Dieu que nul n’a jamais vu, et que notre foi reçoit par l’intermédiaire de nos sens.

C'est la même chose sous d'autres termes que Jésus enseigne, lorsqu'il remercie Dieu de ce qu’il a dévoilé cela aux enfants (v. 13-16) : les vérités éternelles sont manifestées dans son Fils venu en chair ; vérités désormais accessibles à nos sens, aux êtres de chair que nous sommes.

Eh c’est encore ce que dit un mariage — d’où la réponse de Jésus à une question apparemment d’une autre nature : une question sur les dispositions de la Loi de Moïse concernant le répudiation. Une réponse à un tout autre plan : c’est la lecture que je vous propose de ce texte, comme tentative d’explication de ce que Jésus semble ne pas répondre à la question humaine et concrète qu’on lui pose. On lui parle mariage et répudiation, il répond Alliance : « que l’homme ne sépare pas ce que Dieu a uni ». Ce qui renvoie à l’Alliance que Dieu scelle avec les êtres humains, dite à travers une alliance très concrète entre un homme et une femme.
 

*


Les vérités de l'éternité ! — voici qu'elles nous atteignent au cœur même de notre faiblesse, mais cela nous coûte, les recevoir nous coûte — l’abandon de ce que nous croyions savoir de nous —, comme cela coûte à Dieu. C’est l’image et l’enseignement de la venue en chair du Fils de Dieu. Cela nous coûte, comme cela coûte à Dieu.

Cela nous engage comme cela engage Dieu ; en fait, cela nous coûte tout, contre la grâce à bon marché, qui consiste à ne jamais s'engager en rien : abandon de nos illusions pour nous, abandon de la gloire célestes pour le Christ. Et c'est de cela que nous sommes témoins.

Dans les années 1930 et 1940, ce célèbre résistant allemand au nazisme, le pasteur Dietrich Bonhoeffer — un des deux plus célèbres témoins du XXe siècle, avec le pasteur Martin Luther King, de l’engagement concert, jusqu’à leur mort, pour la foi du Christ — Dietrich Bonhoeffer dénonçait ce qu'il appelait « la grâce à bon marché », laquelle se caractérise par ce qu'elle nous épargne les implications coûteuses de l'Évangile.

La grâce à bon marché voudrait nous épargner l'effort sérieux en vue de cet abandon de soi, voudrait nous épargner le travail réel qui est d'entrer dans la grâce du Christ, bref l’engagement de recevoir la Parole vraie de la vie éternelle, Parole vraie de ce qu'elle confronte vraiment le règne de l'illusion et du mensonge.

Eh bien, c’est là la réponse que Jésus donne — à côté de la question qui lui est posée sur la répudiation. Engagement — ici l’un envers l’autre. Signe — comme Dieu s’engage envers nous. Et signe de ce Dieu s’engage envers nous : ce dont Dieu seul est garant — au-delà de la faiblesse des hommes, qui est ce qu’elle est, et qu’il ne nie pas. Dieu s’engageant pour nous comme homme et femme deviennent ce qu’ils sont, une seule chair.

Notons donc que la question posée parle de la répudiation et pas du divorce — que Moïse a permis d’organiser. C’est ce dont a parlé Moïse. Ce n’est pas ce dont parle Jésus. Un peu comme quand on vient lui soumettre une question d’héritage. Il refuse de répondre. « Pour cela, voyez la Loi, qui rend les choses humaines. Moi je suis venu pour autre chose ».

Au-delà des questions concrètes d’organisation du quotidien (non que Jésus dédaigne ces question, mais pour cela il renvoie à Moïse) — au delà de ces questions, est celle de la grâce (la loi est venue par Moïse, la grâce et la vérité par Jésus, dit le prologue de Jean). La grâce est grâce qui coûte — qui coûte tout mais qui est grâce, gratuité, don miraculeux de Dieu — ; grâce qui coûte cependant, et là on retrouve le mot qui est au cœur de l’engagement du mariage : l'amour — qui fonde le don de Dieu.

*


Alors, n’imaginons pas ici je ne sais quelle notion tarte à la crème. L’amour par-ci, l’amour par-là. J’aime Dieu, mon conjoint, mon chien, le bifteck, et à tout prendre, la tarte à la crème.

Et pour agrémenter le tout, parlant de mariage (avant qu’on ne répudie l’autre) on se marie parce qu’on s’aime, comme une cerise sur le gâteau à la crème du repas qui suivra la cérémonie.

Eh bien, non, ce n’est pas une raison pour un mariage, sous peine de risquer de voir le gâteau en question se transformer en soufflet. À ce compte, qu’est-il besoin de se marier ? Non, on ne se marie pas parce qu’on s’aime, mais pour s’aimer. De même qu’on ne se marie pas parce qu’ « on va si bien ensemble ». Il est ici question de signe de l’engagement qui est celui de Dieu.

Une union, une Alliance, se scelle sur la base de ce que l’on se sait différents, radicalement différents. Ça vaut pour le couple, ça vaut entre Dieu et nous. Osons le dire, pas faits pour vivre ensemble, n’était-ce la grâce de Dieu. Rien de plus étranger qu’un homme et une femme. Soyons lucides : ceux qui sont mariés de le savent : les hommes et les femmes ne sont pas faits pour vivre ensemble. Trop différents ! Comme Dieu et homme !

D’où précisément, entre homme et femme, le mariage ; ce scellement qui ne peut concerner qu’un homme et une femme, deux êtres radicalement étrangers. Alors, on ne se marie pas parce qu’on se ressemble, mais parce qu’on est deux êtres radicalement différents ; et ainsi, sachant cela, on ne se marie pas parce qu’on s‘aime, mais pour s’aimer — un engagement, qui coûte.

Radicalement étrangers, venant de deux mondes radicalement étrangers, serait-on voisins de palier ; bref : homme et femme ; on est conscient qu’on est en train de faire naître un monde nouveau, fruit de ces différences.

D’où rupture de chacun d’avec ce qu’il fut. Et cela, c’est difficile. Difficile comme un accouchement l’est pour une mère. Et pourtant, c’est par là que le monde se crée. Le monde n’est fécond que de ses différences.

*


Exactement comme l’union, l’Alliance entre Dieu et les hommes, finalement scellée en Jésus Christ Dieu et homme, fils de Dieu venu en chair. Apparemment l’Alliance de la carpe et du lapin ! Impossible ! Mais ce qui est impossible à l’homme est possible à Dieu.

Et devient indispensable à l’homme : c’est aux enfants d’Abraham que le Christ vient ainsi en aide, dit l’Épître aux Hébreux, et pas aux anges, intelligences pures, exemptes de la chair.

Ainsi en Jésus, Dieu s’est uni à l’humanité, sorte de mariage — une Alliance — pour une seule chair, de sorte que désormais, l’homme ne peut pas séparer ce que Dieu a uni. Et ça c’est le salut, pourvu que nous y entrions, car il n’est point question ici, ion l’a compris de grâce à bon marché.

Voilà une Alliance qui coûte tout aux deux parties. Un abandon. Qui a tout coûté à Dieu, en Jésus devenu vrai homme, jusqu’aux épreuves des hommes. Et qui nous coûtera tout : celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui l’abandonne la trouve pour l’éternité.




R.P.,
Vence,
dimanche 8 octobre 2006







09:45 Écrit par rolpoup dans Dimanches & fêtes | Lien permanent | Commentaires (0)

Les commentaires sont fermés.