Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

« Le temps est accompli | Page d'accueil | Tout à tous »

28 janvier 2006

Laisse aller mon peuple




« Let my people go »

 



 

 



Exode 5, 1 :
Moïse et Aaron vinrent dire au Pharaon: "Ainsi parle le SEIGNEUR, Dieu d’Israël: Laisse partir mon peuple et qu’il fasse au désert un pèlerinage en mon honneur."

Lévitique 25, 10 :
Vous déclarerez sainte la cinquantième année et vous proclamerez dans le pays la libération pour tous les habitants; ce sera pour vous un jubilé; chacun de vous retournera dans sa propriété, et chacun de vous retournera dans son clan.

Luc 4, 17-21 :
17 On lui donna le livre du prophète Ésaïe, et en le déroulant il trouva le passage où il était écrit:
18 L’Esprit du Seigneur est sur moi parce qu’il m’a conféré l’onction pour annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé proclamer aux captifs la libération et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer les opprimés en liberté,
19 proclamer une année d’accueil par le Seigneur.
20 Il roula le livre, le rendit au servant et s’assit; tous dans la synagogue avaient les yeux fixés sur lui.
21 Alors il commença à leur dire: "Aujourd’hui, cette écriture est accomplie pour vous qui l’entendez."


*

L’Exode est la libération des esclaves — « laisse aller mon peuple » —, que l’on devra commémorer, et reproduire le cas échéant. Commémorer, c’est ce que signifient le Shabbat et la Pâque ; commémorer et reproduire, c’est ce que signifie le Jubilé, la 50e année, qui annonce donc le Royaume de Dieu.

Et voilà que Jésus lisant, pour la prédication inaugurale de son ministère, le texte d'Ésaïe annonçant ce grand Jubilé, affirme l'accomplissement de la Parole du prophète. Aujourd'hui s'inaugure l'année jubilaire, l'an de grâce du Seigneur, avec toutes ses conséquences.

Voilà une parole bien étrange que les auditeurs de Nazareth ont de la peine à recevoir. Ils attendront, comme Pharaon face à Moïse, un miracle, pour croire. Et on peut les comprendre. Ce Jubilé, cet an de grâce, on en voudrait tout de même des signes pour le croire.

Et si ce Jubilé est bien le dessillement des yeux aveuglés de ceux qui baignent dans les ténèbres de l'esprit de la captivité, on n'hésitera pas à attendre comme signe que les aveugles recouvrent la vue, selon la lettre de la traduction grecque de la parole du prophète : après tout le Royaume de Dieu n'implique-t-il pas la guérison totale de toutes nos souffrances ; d'où la façon dont les habitants de Nazareth apostrophent Jésus : "médecin guéris-toi toi-même" (Lc 4:23), et ton peuple avec toi.


*

Ceux du village de Jésus lui reprochent de s'intéresser aux étrangers. Et lui ne le nie pas : c'est là un aspect essentiel du Jubilé. Les anciens prophètes eux-mêmes se sont intéressés qui à une Libanaise, qui a un lépreux syrien. Les ancêtres étaient esclaves étrangers, en Égypte. Le Royaume de Dieu est aussi l'élargissement des horizons, et l'ouverture des frontières.

Le Royaume ? Jusqu’à ce que l’on en voie la réalisation concrète, paroles que tous cela ! Comme pour Moïse arrivant en libérateur ! D’autant plus qu’on le connaît celui-là. On l’a vu grandir. À présent, on attend ce qu’il va dire. Et puis voilà que tombe cette parole : "Aujourd’hui, cette écriture est accomplie pour vous qui l’entendez." Passe — comme un ange passe — le temps de la réalisation de ce qu’on vient d’entendre. Puis : il l’a bien dit : il instaure aujourd’hui le Royaume !…


*

Car le Jubilé annoncé par Ésaïe est bien l'inauguration du Royaume... Si un seul Shabbat était respecté, le Royaume viendrait, selon le Talmud.

Et la prise au sérieux du Shabbat, commémorant la création, mais aussi l’Exode (Dt 5), commence par la mise en œuvre du Jubilé — qui indique tout ce qu'implique concrètement la prise au sérieux de la Loi que signifie par le Shabbat. Le Jubilé marque l'espérance de ce jour où le Shabbat devient éternel, ce jour à partir duquel il devient définitivement possible de dire : "c'est aujourd'hui de jour du Shabbat" (Hé 4). Cela est chargé de sens en ce qui concerne les relations humaines, enfin empreintes de sagesse et de grâce. Mais on aimerait le voir, tout cela !

Or voilà : comme face à la recherche de la sagesse, Dieu a opposé la folie de la prédication ; voilà, en ce qui concerne la grâce, que face à la recherche de miracles, qui n’ont pas converti Pharaon, Dieu a opposé la foi miraculeuse à la faiblesse apparente d’un Messie qui sera finalement crucifié.

Sans besoin de signe fracassant, celui qui a reconnu dans le Christ humble la gloire de Dieu saura croire ce propos étrange : aujourd'hui cette parole du prophète Ésaïe est accomplie : ici commence le nouvel Exode, le Jubilé, le grand Shabbat, l'an de grâce qui inaugure le Royaume.

Le croyons-nous ? Croyons-nous cette parole de Jésus selon laquelle la promesse faite à Ésaïe dans le souvenir de l’Exode est accomplie ? « Laisse aller mon peuple. »

Car cette parole même est cette folie de Dieu plus sage que les hommes et cette faiblesse de Dieu plus forte que les hommes. Folie et faiblesse selon lesquelles Dieu a choisi les choses folles et faibles de ce monde pour confondre les sages et fortes (1 Co 1). Or ces choses folles et faibles sont ceux et celles qui sont appelés par l'Évangile pour être sagesse et justice en Jésus-Christ. C'est nous, si nous avons entendu cet appel.

Alors est aussi venu le jour de la confusion de ce monde injuste qui, contre l'Évangile entend se glorifier devant Dieu. Qu'en est-il parmi nous de cette confusion par laquelle Jésus a laissé pantois les habitants de Nazareth voulant le réduire à leur merci ? Comme Moïse confondait le Pharaon… Mais plus d’autre signe que celui de Jonas dorénavant : le tombeau vide.

Croyons-nous que le Royaume a été inauguré ce jour-là selon la parole de Jésus ? Ou sommes-nous de ceux qui lui demandent encore des miracles pour le croire ? Nous le croyons disons-nous... Eh bien, il ne nous reste plus qu’à vivre ce que nous croyons ! Qu’à en vivre la liberté !

Si nous croyons que le Jubilé est advenu, si nous sommes dans l'an de grâce du Seigneur, plus rien ne manque pour que nous en appliquions les modalités : à savoir la liberté ; et la proclamation de la liberté : remise des dettes, annonce de ce que la délivrance des captifs, et des captifs du péché, a eu lieu, proclamation de la libération des victimes de toutes les oppressions possibles, à défaut de guérir des aveugles ; car si nous n'avons pas forcément le don de faire des miracles... nous avons tous celui de remettre les dettes à notre égard, de partager ce que Dieu nous a octroyé, de remettre pour notre part les compteurs à zéro.

Pas des miracles fracassants que Jésus lui-même a refusé de donner ce jour-là. Pas de grande Révolution immédiate. Plutôt quelque chose de l’ordre de la semence et de la germination. De simples signes de ce que nous croyons ce qu’il a dit. Alors, le nouvel Exode a commencé.

Où prend tout son sens notre prière, face aux puissants d’un côté, aux victimes de l’autre, aux opprimés et humiliés, aux victimes de toutes les violences et esclavages, au racisme, etc. Telle est pour notre part notre proclamation du Jubilé inauguré par le Christ. « Laisse aller mon peuple. »

Si le Jubilé dont nous croyons que Jésus l'a inauguré devient, par notre présence, comme visible, alors la confusion des arrogants et des oppresseurs devient réalité. Dieu nous invite à entrer de plein-pied dans le Jubilé, dans le temps de la grâce et dans sa liberté, en place dès aujourd'hui en Jésus-Christ. « Aujourd’hui, cette écriture est accomplie pour vous qui l’entendez. »


R.P.
28.01.06, Antibes, KT

 

 

20:30 Écrit par rolpoup dans Pause caté | Lien permanent | Commentaires (0)

Les commentaires sont fermés.